Qui dit année de première, dit également… bac de français. Cette année encore, Le Malade imaginaire est au programme des œuvres sur lesquelles tu pourrais être interrogé(e). Pour que tu sois fin prêt(e) le jour de l’examen, nous te proposons un résumé et une analyse de cette pièce emblématique de Molière.
Nous te laissons également avec cette vidéo dans laquelle nous faisons le point sur ce qu’il faut à tout prix que tu retiennes du Malade imaginaire de Molière.
Qui était Molière ?
Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, est né en 1622 et mort en 1673. Auteur, metteur en scène et acteur, il mène la troupe de l’Illustre Théâtre et rencontre de nombreuses difficultés et interdictions, malgré le soutien du roi Louis XIV. À travers des spectacles de pur divertissement ou des œuvres polémiques, il représente et dénonce les défauts des hommes et des mœurs de son temps par le rire.
Après douze ans à parcourir le sud de la France avec sa troupe, il rentre à Paris et redonne à la comédie une vitalité nouvelle. Tradition des farces populaires, héritées du Moyen-Âge (voir La farce de maître Patelin) avec Les Fourberies de Scapin (1671), de la comédie-ballet avec Le Bourgeois gentilhomme (1670), la comédie d’intrigue, de mœurs et de caractères avec Le Misanthrope (1666), peinture satirique de la société de caractères à travers des pièces plus graves telles que Tartuffe (1664) ou Dom Juan (1665), toutes ses pièces composent un répertoire qui ignore la contrainte des règles formelles.
Le Malade imaginaire : contexte
Jouée pour la première fois en 1673, Le Malade imaginaire est une pièce comique, qui est à l’origine une comédie-ballet dont la musique est composée par Marc-Antoine Charpentier. Seulement, c’est dans la vie de Molière lui-même que l’on trouve les prémices de l’écriture de cette pièce. En effet, la santé de Molière est altérée depuis près de dix ans à cette époque. Les raisons en sont multiples ; d’ordre psychologique d’abord, en raison du surmenage, la mort de son premier fils à l’âge de onze mois, mais aussi d’ordre physiologique en raison d’une faiblesse pulmonaire. Qu’il ait songé à jouer les médecins qui ne l’ont pas guéri, quoi de plus logique !
Les personnages du Malade Imaginaire
Avant de rentrer dans le vif du sujet et de se plonger dans le résumé de l’œuvre, nous te proposons ci-dessous une liste de chacun des personnages et de leur rôle dans Le Malade imaginaire :
- Argan : il est le protagoniste (personnage principal) de l’histoire, aussi surnommé le malade imaginaire ;
- Béline : elle est la seconde femme d’Argan ;
- Angélique : elle est la fille d’Argan et l’amante de Cléante ;
- Toinette : elle est la servante d’Argan ;
- Louison : elle est la fille cadette d’Argan et sœur d’Angélique ;
- Béralde : il est le frère du malade imaginaire ;
- Monsieur Diafoirus : il est médecin ;
- Thomas Diafoirus : il est le fils de M. Diafoirus et amant forcé d’Angélique ;
- Monsieur Purgon : il est de médecin d’Argan ;
- Monsieur Fleurant : il est apothicaire ;
- Monsieur Bonnefoy : il est notaire.
Malade imaginaire : résumé
La pièce, en trois actes et en prose, tourne autour d’Argan, le « malade imaginaire », éponyme (personnage qui donne son nom à la pièce). Il est veuf et a épousé pour son second mariage Béline, qui fait semblant de lui procurer des soins attentionnés. En réalité, elle n’attend que la mort de son mari pour hériter de sa fortune. Il se fait faire des saignées et des purges (voir définition plus bas) et absorbe toutes sortes de remèdes, prescrits par des médecins pédants (arrogants) plus soucieux d’être agréables à leur patient que de participer à l’amélioration de sa santé. Pour les tromper, Toinette, sa servante, se déguise en médecin et lui dispense de nombreux conseils ironiques et moqueurs pour la profession.
Angélique, sa fille, aime Cléante, ce qui contrarie Argan, car il préférerait la voir épouser Thomas Diafoirus, lui-même médecin. Pour les tirer d’affaire, Toinette recommande à Argan de faire le mort. Sa femme, appelée par Toinette, manifeste, devant celui qu’elle croit mort, sa joie d’en être débarrassée. Angélique, appelée ensuite par Toinette, manifeste un chagrin sincère à la mort de son père, qui arrête aussitôt son jeu et accepte l’union avec Cléante, à la condition que celui-ci devienne médecin. Béralde, frère d’Argan, conseille à ce dernier de devenir médecin à son tour, menant à une fin burlesque de la pièce, à savoir la cérémonie bouffonne de l’intronisation du « malade imaginaire » comme médecin.
Argan, le personnage principal, se situe au carrefour de trois tendances opposées. La première représente l’hypocrisie et les intérêts personnels (incarnés par Béline et M. Bonnefoi), l’hypocrisie et les intérêts professionnels (les Diafoirus, M. Purgon et M. Fleurant) et enfin la sincérité, l’affection, le bon sens et la bonté (Cléante, Angélique, Toinette, Béralde, Louison).
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La comédie à l’époque de Molière
En premier lieu, pour t’aider à inscrire l’œuvre de Molière dans le parcours d’étude proposé, voici quelques éléments caractéristiques de ce genre. Le terme « comédie » vient du latin comedia, dérivé du grec komoï. Il désigne le cortège animé formé à l’occasion des fêtes organisées en l’honneur de Dionysos qui évolue vers des farces et des pantomimes pour aboutir à la comédie, dont la plus ancienne est due à Aristophane (Ve – IVe siècles avant J.-C.). La comédie présente des personnages ordinaires avec leurs travers et leur ridicule sur un ton léger.
Au XVIe siècle, en Italie, la commedia dell’arte revient aux types de personnages facilement identifiables (le valet, dont Arlequin est le grand représentant, l’amoureux, le vieillard) que les acteurs mettent en scène en improvisant à partir d’un simple canevas (points principaux d’un ouvrage, trame), la gestuelle étant primordiale. Molière s’inspire de ce modèle.
En France, au XVIIe siècle, période pendant laquelle Molière écrit ses textes, le classicisme codifie la comédie et l’impose en tant que genre. A noter que le théâtre grec est la source du théâtre européen auquel il transmet ses thèmes fondateurs et des principes formels.
Le comique dans Le Malade imaginaire
Petite étude d’onomastique
Pour commencer, l’onomastique, c’est-à-dire l’étude des noms propres, permet d’ores et déjà de déceler le comique. Ainsi, Purgon est clairement affilié au verbe « purger ». La purge est une pratique de la médecine traditionnelle basée sur l’utilisation de plantes médicinales (ou parfois aussi sur le jeûne) et dont le but est d’améliorer les processus de détoxication et d’évacuation de l’organisme. À l’époque, la pratique du lavement pour « évacuer » les « mauvaises humeurs » du sang était courante.
Dans cette perspective, le nom de « Diafoirus » évoque le mot dérivé du terme vulgaire « foirer », en mettant en avant la dimension de dérèglement, d’échec contenu dans le nom même du potentiel médecin.
Plusieurs formes de comique
L’héritage de la farce est représenté dans cette pièce dans toute sa splendeur. En premier lieu, le comique de geste et le comique de mots tiennent une bonne place, comme on peut le voir au moment où Argan poursuit Toinette (acte I, scène 5), qui conduit à une véritable bataille d’oreillers. Par ailleurs, la servante se déguise en médecin, avant de déboucher vers la cérémonie, réelle mascarade. Dans le comique des mots, c’est évidemment le langage professionnel qui domine, celui des médecins.
En outre, un des éléments centraux de la comédie réside dans le comique de situation, et en particulier des quiproquos. On peut citer le moment où Cléante est pris par Argan pour un authentique maître de musique. Les rencontres inattendues, les oppositions cocasses de personnages abondent également.
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Le spectacle au cœur de la pièce
On l’a dit, Le Malade imaginaire est à l’origine une comédie-ballet, qui mêle chant, danse et théâtre. Il s’agit d’une forme très appréciée de Louis XIV. C’est donc un spectacle sur tous les plans, car cette pièce allie stimulation visuelle et auditive en convoquant différentes formes d’arts pour la Cour.
Par ailleurs, on peut noter que cette œuvre est aussi une pièce dans la pièce. Cette mise en abîme se manifeste notamment par les apparitions de Toinette, la domestique, qui orchestre un certain nombre de situations. Ainsi, son intervention la plus notable est le moment où elle fait simuler la mort d’Argan pour permettre de démasquer le caractère vénal de sa femme Béline, et révéler la loyauté de sa fille Angélique.
Remarquons aussi l’attitude de Béralde : il joue un rôle d’organisateur de spectacles, comme s’il était lui-même metteur en scène, intermède. Pour cela, il introduit les danseurs auprès d’Argan lorsqu’il fait face à un épisode de colère en annonçant : « Je vous amène ici un divertissement que j’ai rencontré, qui dissipera votre chagrin. »
Plus largement, le procédé de mise en abyme (peut aussi s’écrire abîme), de théâtre dans le théâtre, permet de souligner les défauts de l’homme en accentuant le comique. Celui-ci permet de conférer davantage de légèreté, dédramatiser par le mécanisme « plaire et instruire ».
La satire dans Le Malade imaginaire
La pièce se moque du bourgeois naïf hypocondriaque, qui est prêt à tout croire de son médecin. Ce dernier est l’équivalent d’un Dieu pour Argante, pour lequel on finit par avoir de la pitié. Le médecin est présenté comme une personne sadique, prenant plaisir à tourmenter Argante. C’est cette figure qui est véritablement condamnée, car elle profite de l’ignorance des patients. Dans le même temps, il est reproché aux médecins leur amateurisme, leur manque complet de connaissances médicales.
Dès lors, les médecins dictent leur conduite aux patients, se placent en maîtres incontestables. M. Purgon fait ici en sorte qu’Argan se sente coupable, qu’il ait l’impression d’avoir pêché en exploitant sa crédulité.
Par conséquent, on voit donc bien dans cette pièce l’importance de la notion de castigat ridendo mores théorisée par Horace. Cette formule signifie « corriger les mœurs par le rire ». Il s’agit pour Molière de dénoncer certaines attitudes en faisant rire, pour mieux interroger les spectateurs et les lecteurs sur ces problèmes. L’idée essentielle derrière ce concept est que les vérités sont véhiculées par le rire ; celles-ci sont accessibles au plus grand nombre. En ce sens, la comédie fait rire, divertit, mais par le rire, elle cherche à critiquer.
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Le mariage dans Le Malade imaginaire
Autre thème très important dans Le Malade imaginaire : le mariage. Dans la pièce, on compte quatre types de mariages possibles :
- Le mariage de raison : Angélique et Thomas Diafoirus ;
- Le mariage d’intérêt : Béline et Argan ;
- Le mariage avec Dieu : la menace du couvent ;
- Le mariage d’amour : Angélique et Cléante.
Molière met en lumière les différents mariages envisageables et, conscient de l’injustice dont sont victimes les femmes, défend une conception du mariage dans lequel les femmes sont entendues, leur avis est pris en compte.
Encore une fois, le dramaturge se moque de ce qui existe dans la société et tourne en ridicule ses personnages.
Analyse de la scène 5 de l’acte II du Malade imaginaire
Le passage s’articule autour du lavement d’Argan (le lavement est une procédure lors de laquelle un liquide, ou parfois un gaz, est injecté dans le rectum par l’anus soit pour administrer un médicament, soit pour évacuer le contenu du côlon). On y voit l’utilisation du champ lexical de la scatologie, terme qui désigne des écrits ou des propos se rapportant aux excréments. Tout tourne autour de la colique, de la diarrhée, du vomi (« âcreté de votre bile »). Ces détails sont triviaux et sont inconvenants. Ils s’opposent à la bienséance qui est de mise pour ces sujets intimes et vulgaires. Cette forme de comique est empruntée à la farce du Moyen-Âge, comme dans Gargantua de Rabelais.
Tout d’abord, on note le comique de situation mené par la relation entre Argan et Monsieur Purgon, qui suscite inéluctablement le rire. Cette relation repose sur la hiérarchie entre ces deux personnages, qui se matérialise par la prise de parole plus imposante du côté de M. Purgon : Argan n’arrive pas à s’imposer dans la discussion.
De plus, M. Purgon emploie des hyperboles pour exagérer la situation d’Argan afin de lui faire peur. Il gronde son patient et le menace de l’abandonner à sa « mauvaise constitution ». Son objectif n’est pas vraiment qu’il soit guéri. Il profite de sa faiblesse et sa naïveté pour lui faire peur et s’enrichir avec le médecin. De l’autre côté, Argan a peur de ne plus avoir de médecin ; il s’excuse et accuse son frère. Cette scène met en avant la figure du bourgeois naïf qui suit aveuglément les directives et les ordres des personnes qu’ils engagent. Ces dernières sont pour eux des spécialistes qu’il n’est pas bon de contredire, ce qui conduit à des situations d’abus de pouvoir.
Dans cet extrait figure le comique de caractère : Toinette est une domestique plus avisée que son maître et qui s’en moque ouvertement. M. Purgon quant à lui est excessif et donc ridicule. Argan est ridicule également, car il a peur, il est soumis au médecin et accepte qu’on s’adresse à lui de manière irrespectueuse.
Enfin, le rythme du dialogue est rapide, comme le montrent les répliques courtes et rapides : les stichomythies. Ce sont des échanges verbaux rapides, vifs, en paroles ou en vers, généralement, qui marquent une accélération dans le dialogue. Argan ne parvient pas à terminer ses phrases. Notons que la servante Toinette fait de brèves interventions ironiques.
Pour conclure, si Le Malade imaginaire est la synthèse des opinions de Molière sur les médecins, la médecine et la faiblesse humaine, elle est aussi une anthologie, la plus complète et peut-être la plus parfaite de l’art comique de Molière.
Quelques citations à retenir du Malade imaginaire
Pour finir sur Le Malade imaginaire, nous t’avons concocté un petit florilège de citations à retenir pour intégrer dans tes dissertations :
- « Presque tous les hommes meurent de leurs remèdes, et non pas de leurs maladies. » Acte III, scène 3.
- « Ce ne sont point les médecins qu’il joue, mais le ridicule de la médecine. » Acte III, scène 3.
- « Je ne vois rien de plus ridicule, qu’un homme qui veut se mêler d’en guérir un autre » Acte III, scène 3.
- « Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. » Acte III, scène 3.