Comme beaucoup de secteurs, l’édition peine à embaucher. Pour beaucoup d’étudiants, les nombreux refus deviennent part de leur quotidien et ils peinent à trouver l‘offre qui leur convient. Grâce à des témoignages et des avis d’étudiants, on va t’expliquer la ou les raisons pour lesquelles ce secteur peine à embaucher.
Le master édition : un diplôme très sélectif pour très peu de places
Lors des entretiens effectués, un fil conducteur relie les propos des étudiants interviewés : les masters d’édition sont très sélectifs. Prenons l’exemple d’Emmanuelle, étudiante en seconde année en master d’édition à Paris, qui nous a expliqué qu’elle « [a candidaté] à 7 masters », dont 6 qui l’ont refusée sur Paris, et qui a finalement été acceptée dans sa septième option.
Il est très difficile de pouvoir intégrer ces formations. En général, elles ne peuvent accueillir qu’une vingtaine d’étudiant(e)s au maximum pour les deux années. La concurrence est rude et les étudiant(e)s doivent faire preuve d’ingéniosité s’ils souhaitent intégrer ces formations.
Selon Lisa, ancienne étudiante du master d’édition à Strasbourg, « [elle] considère que si l’on veut travailler dans l’édition ou dans le secteur du livre, un master de ce type est primordial ». Ces formations sont la clé pour intégrer ce milieu qui semble si fermé, car elles proposent des stages ou des formations en alternance pour les étudiants.
Ainsi, les entretiens deviennent un rite de passage important lors duquel plusieurs des étudiants nous ont donné de judicieux conseils. Emmanuelle conseille de « bien [préparer les] oraux pour les entretiens, [de penser à sourire] et [de se faire] un pitch pour ne [rien oublier] d’important [le jour J] ». Sandra nous suggère également « de faire des recherches approfondies sur le milieu du livre et d’avoir une maison d’édition préférée », car ce sont des questions susceptibles d’être posées.
Paris, puis le reste de la France ?
Une raison qui explique le manque d’emploi est l’omnipotence de Paris dans le secteur de l’édition. En effet, les plus grandes structures, celles qui sont à même d’employer, sont parisiennes. Hachette, Éditis, Gallimard, Albin Michel, Robert Laffont, Actes Sud. Toutes les plus grandes maisons ont leurs sièges sociaux dans la capitale (ou au moins, un siège, dans le cas d’Actes Sud).
À cause de cette omniprésence, le monde de l’édition souffre d’un déséquilibre entre Paris et la province. Cette situation est d’autant plus notable quand on sait que, parmi les étudiantes parisiennes, aucune n’a candidaté hors de Paris. En revanche, les provinciaux, eux, admettent avoir soit cherché dans leur région, soit dans Paris même.
Lisa nous explique qu’en Alsace, « le secteur du livre est très bouché, car les maisons d’édition font face à des difficultés financières qui ne leur permettent pas d’embaucher ». Elle nous explique que seulement deux personnes de sa promotion ont obtenu un poste dans une maison d’édition alsacienne.
On retrouve, dans notre entretien croisé sur le milieu de l’édition, le propos de Daniel : « les niveaux de rémunération ne permettent pas de subvenir aux besoins sur Paris ». C’est pourtant là une réalité à laquelle sont confrontés tant d’étudiants hors de Paris, car ils connaissent la nécessité d’être dans cette ville. Les étudiants parisiens l’attesteront eux-mêmes, comme nous a déclaré Sandra : « C’est préférable de faire un master pro sur Paris et en alternance ».
Travailler dans l’édition, un marché peu rentable ?
Comme tout secteur, l’édition est un commerce. Il dépend donc de la rentabilité de ses ventes en termes de livres. Le marché du livre rapporte pourtant beaucoup. En 2023, le chiffre avoisinait les 3 milliards d’euros d’après le Syndicat National de l’Édition (SNE). Nous savons aussi que les Français sont de grands lecteurs. En 2024, il était près de 40 millions de lecteurs selon le SNE.
Pourtant, les étudiant(e)s pourront le témoigner : les maisons d’édition peinent à être rentables, du moins les petites maisons d’édition indépendantes. Ici, il ne s’agit pas seulement d’un souci d’ancrage provincial ou parisien, seulement de la taille des structures. Le marché est monopolisé par de grands groupes, ce qui crée une économie bancale et crée peu d’opportunités pour de nouvelles entreprises.
C’est là pourtant l’identité de l’édition. Comme preuve, voici ce que nous a confié Daniel : « J’ai eu un premier stage dans une maison d’édition indépendante parisienne qui se spécialise dans la littérature du Proche-Orient, surtout de la Turquie. Elle est de très petite taille avec des conditions de travail compliquées et n’est pas rentable ».
Emmanuelle se trouvait également dans une situation similaire : « La maison d’édition dans laquelle j’ai fait mon stage en 2022-2023 était en fin de vie, pas d’argent pour payer qui que ce soit. Il n’y avait d’ailleurs plus que moi et deux alternantes employées dans la boîte ».
L’IA et l’édition : une convergence inévitable ?
C’est lors de la Foire du livre à Francfort en 2024 que les professionnels du livre ont discuté de l’avenir de l’édition. Ce serait donc l’IA qui remplacerait les éditeurs et les agents littéraires ? Selon la start-up berlinoise, MyPoolitzer, oui, et grâce à un outil qui garantirait « la qualité de la sélection des manuscrits ». La start-up n’était d’ailleurs pas la seule à présenter ses outils et technologies innovantes pour le monde de l’édition.
L’IA, cette nouvelle technologie, fait partie de ces « difficultés extérieures », sans nul doute motivées « à cause de l’économie générale ». Dans le cadre de l’édition, la présence d’un outil est à double tranchant. En effet, on assiste à une généralisation de l’outil qu’est l’IA dans plusieurs domaines. Toutefois, la question dans le monde de l’édition ne s’attache pas tant à la pertinence des outils.
La question de l’IA dans l’édition regroupe un ensemble d’interrogations et de questionnements, en particulier quant à la place de ses outils au détriment des emplois. Son usage éthique est plus au centre du problème que l‘outil lui-même. Beaucoup de corps de métiers du monde de l’édition utilisent déjà des applications d’intelligence artificielle dans leurs tâches. C’est seulement que l’arrivée de ChatGPT a créé un remous dans le monde, y compris celui du livre.
Pour les professionnels de l’édition, l’IA menace potentiellement un secteur d’activité fragile qui subit déjà le monopole des grandes structures et la disparition progressive des petites structures. Ainsi, le monde de l’édition se trouve dans un tournant technologique sans précédent qui touche les perspectives d’emploi.
Pourquoi faire un master d’édition ?
Malgré les difficultés, l’édition reste un milieu très attractif pour les étudiant(e)s et littéraires. Il ne se résume pas forcément au travail d’éditeur. L’édition représente plusieurs domaines, tels que la fabrication, le droit, le commerce, le marketing ou encore la communication. Tous sont nécessaires à la fabrication d’un ouvrage.
L’édition est aussi un secteur essentiel dans les métiers de la rédaction et du journalisme. Les masters édition sont d’ailleurs très recherchés et estimés dans ces milieux. Ils permettent d’apprendre de nombreuses compétences, telles que :
- la rédaction professionnelle
- la gestion d’un budget
- le processus marketing d’un produit
- l’orthotypographie (correction de texte)
- l’usage des nouvelles technologies (Photoshop, InDesign, Word, IA)
- la connaissance de la chaîne du livre
En plus de nombreux stages et de formation en alternance, les étudiant(e)s lauréat(e)s d’un master d’édition détiennent un savoir-faire complet et transversal. Que ce soit dans le milieu du livre, de l’édition ou bien d’autres, ce master reste une formation de qualité qui a le mérite de préparer ses étudiant(e)s aux problématiques du monde de la culture et du livre.
Si toi aussi tu es déterminé(e) à travailler dans le milieu du livre et de l’édition, on te souhaite de réussir et espère que tu sauras trouver un travail en tant que futur(e) éditeur (éditrice) 😌.