Dans cet article, nous te proposons un corrigé pour le sujet : comment analyser le déclassement dans la société française contemporaine ? L’occasion pour toi de faire le point sur des notions importantes de ton programme de spécialité sciences économiques et sociales (SES).
Omniprésente dans le débat public, la notion de déclassement est une crainte exprimée individuellement, mais également une réalité sociale et statistique de nos jours.
Définitions des termes du sujet
Le terme de « déclassement » désigne une mobilité sociale descendante. C’est lorsque l’individu ou le groupe occupe une position sociale inférieure à celle de ses parents ou bien à celle qu’il occupait au début de sa vie. On distingue deux types de déclassement. D’une part le déclassement intragénérationnel, d’autre part le déclassement intergénérationnel.
Le déclassement intragénérationnel se manifeste lorsque la position sociale occupée est inférieure à celle que l’on occupait dans le passé.
Le déclassement intergénérationnel, lui, se manifeste lorsque la position sociale occupée est inférieure à celle de ses parents.
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Analyse du sujet
Pour bien analyser le sujet, il faut bien analyser les termes, outre les termes définis. Ainsi, « la société française contemporaine » désigne la société française la plus récente, de nos jours. Mais, cela ne signifie pas qu’il ne faut absolument pas évoquer le passé et l’évolution de la mobilité sociale dans le temps et dans l’espace. Cependant, le cadre spatio-temporel dominant sera tout de même la France et de nos jours, donc la France actuelle.
Points historiques à évoquer
Dans un premier temps, il faut mentionner les Trente Glorieuses. Cette période est l’apogée économique pour la France, un pic de croissance. L’économie étant fortement liée à la société, cela a, donc, forcément, un impact positif sur la société. En effet, cette période est caractérisée par l’apogée des classes moyennes. Donc, on peut constater un lien entre croissance et mobilité sociale, un ralentissement économique comme celui d’aujourd’hui pourrait alors aggraver cette crainte du déclassement.
D’ailleurs, dans les années 1980, nous avions déjà eu une hausse des inégalités et du déclassement du fait de nombreuses crises économiques liées à la forte libéralisation et le développement de la finance.
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Proposition de plan
I. Les causes du déclassement
A. Les fluctuations économiques
C’est au début du XXe que naît, sous l’influence des auteurs allemands, la notion de classes moyennes salariées, en effet, avec la croissance de la première révolution industrielle, il y a une une moyennisation de la société et donc une mobilité ascendante d’un côté et une mobilité descendante de l’autre, afin de former un tout. Nous retrouvons un peu le même concept durant les Trente Glorieuses. En revanche, la progression des classes moyennes s’est arrêtée au début des années 1980, du fait d’une hausse des inégalités, en effet, une polarisation de la société a eu lieu, de ce fait beaucoup de personnes, étant considérées de classe moyenne subissent un déclassement. D’où la grande peur du déclassement dans les années 2000 et encore aujourd’hui avec la succession de crises économiques : crise des subprimes de 2008, crise sanitaire et économique du coronavirus, crise économique provoquée par la guerre en Ukraine.
B. Les transformations du marché du travail
En parallèle, il y a une évolution du marché du travail qui peut être cause de déclassement pour certaines. En effet, l’arrivée des femmes sur le marché du travail et les mouvements migratoires dont augmenter la quantité de travail offerte, on peut faire référence ici à la théorie de déversement de Sauvy. Comme l’offre devient supérieure à la demande, les salaires baissent, ce qui se résulte par un sentiment de déclassement. De plus, ces derniers temps, un phénomène de tertiarisation suivant la loi d’Engel provoque beaucoup de délocalisation des activités industrielles et, donc du chômage pour certains, pour d’autres une forte uberisation du travail caractérisé par des emplois précaires et une faible protection. Aujourd’hui, la mode est à la flexibilité interne et externe du travail et non pas la flexisécurité. De ce fait, les personnes subissent un déclassement plus rapide et dur à supporter.
II. Pour certains, le déclassement est, alors, une réalité sociale et statistique
A. D’importantes inégalités intergénérationnelles et un certain déclassement scolaire sont observés
Louis Chauvel, dans son ouvrage Les Classes moyennes à la dérive, mettait en lumière le fait que la question sociale ne se situait plus à la périphérie, dans la marginalisation d’une sous-classe désaffiliée, mais au cœur même de la société et qu’elle concerne une partie des classes moyennes salariées. La déstabilisation de ces catégories, autrefois considérées à l’abri des difficultés rencontrées par les classes populaires, s’illustre par de multiples indices tels que la stagnation des revenus intermédiaires, la fragilisation du salariat, le déclassement scolaire des jeunes diplômés et les processus de mobilité sociale descendante. Tiré d’une thèse de sociologie soutenue en 2007, l’ouvrage de Camille Peugny analyse en profondeur l’un de ces indices : le déclassement social entre les générations. Il s’agit, pour les individus, d’occuper un statut social inférieur à celui de leurs parents – le statut étant mesuré par la catégorie professionnelle.
Enfin, à partir de différentes enquêtes empiriques, le sociologue américain Charles Arnold Anderson a mis en évidence, dès 1961 aux États-Unis, le constat a priori paradoxal selon lequel la mobilité sociale n’a qu’une relation faible avec le niveau d’instruction. Le paradoxe d’Anderson est un paradoxe empirique, qui établit que l’acquisition par un étudiant d’un diplôme supérieur à celui qu’a pu obtenir son père ne lui assure pas nécessairement une position sociale plus élevée. C’est une preuve de déclassement réel.
B. Mais pour d’autres, le déclassement relève d’une peur et non d’une réalité
Dans un rapport du CAS, datant de 2013, le constat suivant émerge : les personnes se considèrent moins dans la classe moyenne et pensent au contraire être dans la classe inférieure, même lorsque cela ne correspond pas à la réalité.
La peur du déclassement est un phénomène d’une autre nature, c’est la perception du risque de déclassement. C’est une notion psychologique et sociale distincte de la réalité du déclassement proprement dit, notamment sur le plan quantitatif… Sont concernés par la peur du déclassement des individus qui ne le subiront peut-être pas. C’est tout l’intérêt du livre d’Eric Maurin que de questionner les liens entre le déclassement réel et sa perception. La peur pose un problème spécifique dans le cadre de l’économie française contemporaine, car être licencié aujourd’hui entraîne une période de chômage de longue durée et la perte d’un statut. D’autant qu’il existe des inégalités face au chômage : ainsi on constate qu’il touche plus fortement les non-diplômés. Dès lors, la peur du déclassement est importante, car elle a un coût élevé. Elle induit un comportement protecteur de la part de ceux qui ont le plus à perdre (les classes moyennes et les classes supérieures). On retrouve ici les conclusions d’autres travaux d’Eric Maurin sur les comportements résidentiels ou scolaires .