En 2013, l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping marque un tournant pour la Chine. Il veut atteindre le « Rêve chinois » : prospérité économique, puissance politique, puissance militaire etc. Comment se rêve s’est-il concrétisé?
La Chine : une puissance en construction
L’obsession de la puissance chinoise remonte au « siècle de la honte »1. Dès lors, émerge à partir de 1919 une conscience nationaliste chinoise, avec pour but d’effacer ce siècle, de prendre sa revanche.
La construction d’une puissance militaire en Chine
Depuis le milieu des années 1980, la Chine veut développer des capacités de projection pour un déploiement plus rapide de ses forces et combler l’écart technologique avec les États-Unis. En 2020, les dépenses militaires chinoises atteignent 13% du total mondial, ce qui la place au deuxième rang. 2
La maîtrise des mers en Chine
La maîtrise des mers, autre atout de la puissance militaire3 devient alors essentielle. La Chine introduit son premier porte-avion en 2012, et son second en 2017. Elle modernise ses forces navales opérant à l’intérieur de la première chaîne d’îles du Japon à l’Indonésie et développe une force navale régionale qui atteint la deuxième chaîne d’îles (Guam). Enfin, elle établit une force navale globale. De plus, la Chine se dote de la « stratégie du collier de perles ». 4
Contrôler le cyberespace
En 2014, est créé le groupe dirigeant de l’information et de la sécurité d’Internet. Son but est d’encourager la poursuite du développement économique du secteur. 5 La Chine développe tout un réseau d’espionnage contre les puissances extérieures (l’unité 61 398 a été accusée plusieurs fois d’espionnage des réseaux américains et canadiens)
Répondre aux menaces intérieures et frontalières
6La Chine a « cinq poisons » internes dont elle doit s’occuper : 3 séparatismes (Taïwan, les Ouïgours et le Tibet), le mouvement Falun Gong et les activistes démocrates. En 2011, son budget de maintien de l’ordre a dépassé le budget de défense. À cela s’ajoutent les menaces aux frontières (chaîne himalayenne, Inde, Bhoutan, mer de Chine). Avec 14 pays frontaliers (dont 4 ont l’arme nucléaire) et 14 500 km de côte, la Chine se méfie de ses voisins, d’autant plus que le Japon, la Corée du Sud et la Thaïlande ont des traités avec les États-Unis.
La construction d’une puissance culturelle (soft power)
On ne peut pas parler d’influence sans aborder le soft power. En effet, cette « puissance douce » a pour caractéristique de répandre l’influence chinoise à travers le monde. Si la Chine était en retard, depuis les années 2000, elle a largement internationalisé ses médias officiels (agence Xinhua), diffusé sa langue (instituts Confucius7) et mis en place des bourses de langue chinoise aux étudiants étrangers. Cependant, la Chine attise encore beaucoup les critiques en raison du Parti Communiste Chinois.
La chine : des rapports au monde complexes
Un acteur diplomatique majeur sur la scène internationale
La Chine est membre de la plupart des grandes institutions internationales : ONU, Banque mondiale, Fonds monétaire international, Organisation mondiale du commerce. Si elle était prudente à l’ONU dans ses débuts, elle prend plus de positions dès les années 1980 et participe aux missions de paix après 19898 afin de redorer son image. La Chine devient alors le deuxième contributeur de l’ONU, mais en revanche, elle utilise de plus en plus son véto. 9 En 2008, la Chine accueille les jeux olympiques, ce qui la place sous les projecteurs de la scène internationale. Par ailleurs, elle établit des partenariats avec l’Afrique10 et est son premier partenaire commercial depuis 2011, tellement qu’on parle d’une émergence d’un néocolonialisme chinois.
Au niveau économique, la Chine crée en 2014 la NBD (nouvelle banque des BRICS), rejointe récemment par l’Algérie (2024) et l’Égypte (2023). Ainsi, elle accède à un système bancaire indépendant de l’occident, et renforce son influence sur la juridiction et le système monétaire international. C’est dans cette optique qu’elle utilise l’APD11 dans le pacifique sud, afin d’accroître sa puissance. Elle investit de manière colossale dans de nombreux pays de l’Indopacifique (cf. collier de perles).
L’influence chinoise face aux États-Unis

La rivalité économique entre la Chine et les États-Unis
Après la répression de Tian’anmen, la Chine a dû faire face à des sanctions économiques de la part des Américains. Si les deux puissances sont interdépendantes économiquement, le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche a réengagé une véritable guerre économique12 entre les deux pays. Si la Chine avait déjà interdit les GAFAM sur son territoire depuis la fin des années 2000, à la place, les utilisateurs chinois utilisent les BATX, l’équivalent chinois des GAFAM, Donald Trump a tenté d’interdire TikTok, sous prétexte d’espionnage (actuellement, l’administration Trump est encore à la recherche d’un acheteur pour le groupe Bytedance, détenteur de TikTok). Aujourd’hui, la guerre économique se joue à coups de hausse de taxes douanières et de menaces.
Les rivalités en Asie-Pacifique
Une très forte lutte d’influence se joue entre les deux grands en Asie-Pacifique depuis la stratégie du « pivot asiatique » d’Obama13. En réponse, la Chine a conclu le RCEP14 (signé en 2020, mais les négociations ont débuté en 2012), qui l’associe aux dix pays de l’ASEAN, plus le Japon, la Corée du Sud, l’Inde, Australie et la Nouvelle-Zélande.
Cependant, il y a un profond déséquilibre stratégique entre la Chine et les États-Unis. L’un est une hyperpuissance militaire (les USA ont plus de 600 bases militaires à l’étranger et 11 porte-avions dans 6 dans le Pacifique, 2 pour la Chine), et l’autre est une puissance militaire encore en construction, bien que bien avancée. De plus, la Chine n’a qu’une seule alliance à proprement parler : la Corée du Nord.
Le partenariat stratégique entre la Chine et la Russie
Dans les années 1990, la Chine et la Russie développent des relations pragmatiques, telles que la frontière est démilitarisée. La Russie devient alors le principal fournisseur d’arme et de technologie militaire de la Chine (embargo de l’Occident depuis Tian’anmen). De plus, une coopération économique et une complémentarité énergétique sont mises en place entre les deux pays.
Les deux ont une position commune face à l’occident: ils veulent un monde multipolaire (entre 2011 et 2014) et opposent quatre veto contre le conflit syrien à l’ONU. En 2014, un gazoduc commun est construit et des exercices militaires conjoints prennent place dans le Pacifique et la Méditerranée orientale.
Ensemble, ils sont moteurs de l’OCS (organisation de coopération de Shanghaï), un vecteur d’influence dans la région.
L’Asie : affirmation de la puissance et de l’influence chinoise
Depuis les années 2000, la Chine opère une politique de bon voisinage. Ainsi, elle approfondit ses relations économiques, en 2001 avec l’OCS et en 2002 en signant l’ASEAN, ainsi qu’avec la détermination de la région du grand Mékong.
Finalement, la Chine a connu une influence grandissante dans le monde et occupe désormais une place majeure dans le théâtre géopolitique des nations, que ce soit sur les plans militaires, économiques ou politiques. Cependant, c’est encore une puissance qui tente de s’affirmer, notamment dans sa confrontation avec les États-Unis, puissance majeure depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
- Le XIXème siècle est désigné comme tel face aux défaites impérialistes de la Chine (traité de Nankin, guerres de l’opium, occupation japonaise etc) ↩︎
- EU: 39% du total mondial et Inde: 3,7% (3ème rang mondial) ↩︎
- cf le « hard power » de Joseph Nye dans Bound to lead ↩︎
- Sa seule base à l’étranger se situe à Djibouti ↩︎
- ainsi que de limiter la liberté d’expression sur les réseaux chinois ↩︎
- Les Falun Gong sont une secte chinoise qui s’oppose à la dictature en place. Pour en savoir plus à ce sujet, tu peux consulter cet article: https://shs.cairn.info/revue-critique-internationale-2001-2-page-36?lang=fr ↩︎
- Les Instituts Confucius sont «des établissements culturels publics à but non lucratif visant à diffuser la langue et la culture chinoise dans de nombreuses villes à l’échelle mondiale» (source: Géoconfluence) ↩︎
- date à laquelle s’est passé la répression féroce de la place de Tiananmen à Pékin, lors de manifestations étudiante (à noter que toute mention à cet évènement est proscrite en Chine et censurée sur les médias chinois) ↩︎
- vainqueur de la seconde guerre mondiale, la Chine fait parti des pays ayant un droit de veto à l’ONU ↩︎
- tous les trois ans ont lieu des forum de coopération ↩︎
- Aide pour le développement ↩︎
- tu peux écouter ce reportage de radio France afin de mieux comprendre les tenants de cette guerre économique https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/affaires-etrangeres/chine-etats-unis-la-guerre-commerciale-1915005 ↩︎
- En 2011, l’administration Obama lance cette stratégie pour faire face à l’essor économique et militaire de la Chine, qui gagne en influence dans la région ↩︎
- Partenariat Économique Régional Global ↩︎







