fleurs du mal

Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire : résumé et analyse

À lire dans cet article :

Bac français 2024. L’épreuve écrite du baccalauréat de français aura lieu, cette année, le 14 juin. Pour te préparer au mieux à cette épreuve, nous te proposons une fiche de lecture sur le recueil de poèmes, Les Fleurs du Mal, de Charles Baudelaire. Cette œuvre n’est désormais plus au programme, mais c’est un très bon entraînement.

Pour rappel, le programme du bac de français est composé de 12 ouvrages :

Tu trouveras sur notre site internet des fiches de lectures pour chacune de ces œuvres.

Qui était Charles Baudelaire ?

Avant d’étudier cette œuvre de Charles Baudelaire, voici un petit récapitulatif de sa vie. Cela te permettra d’acquérir des éléments de contexte sur l’écriture des poèmes et sur son époque.

Baudelaire est né en 1821 à Paris et est mort en 1867. Il perd son père à l’âge de six ans et sa mère se remarie avec le général Aupick, remariage que Baudelaire vit mal. Il mène des études chaotiques et dissipées et traîne dans le milieu parisien (notamment dans le quartier latin) des artistes et des prostituées en ayant une vie de dandy (homme se voulant élégant et raffiné, parfois impertinent). Face à cette vie décadente, sa famille décide de placer ses biens sous tutelle (une personne autre que Baudelaire est chargée de gérer son argent et ses biens). Pour vivre, ce dernier devient critique d’art, traducteur (il a traduit l’œuvre d’Edgar Poe) et journaliste.

Malade (il est atteint de la syphilis, une infection sexuellement transmissible), il s’exile deux ans en Belgique avant de revenir à Paris, paralysé et aphasique (ayant un trouble de la communication sous toutes ses formes).

Présentation des Fleurs du Mal

Les Fleurs du Mal est un recueil des poèmes de Baudelaire écrits entre 1840 et 1857, date de publication de ce dernier. C’est une œuvre majeure de la poésie moderne. Les poèmes rompent avec le « style convenu » de la poésie classique et de ses codes stricts en usage jusqu’alors. De nombreuses formules ont une forte dimension expressive et visuelle qui font qu’à la lecture, de nombreuses images apparaissent à l’esprit du lecteur.

Sa poésie, lyrique, exprime le spleen, un mal de vivre formé d’un mélange d’ennui et d’angoisse existentielle ; elle traduit sa quête du Beau dans l’idéal, mais aussi le mal et le laid. Située au carrefour du romantisme et du symbolisme (voir la dernière partie de cet article), sa poésie est moderne. Elle met en œuvre les correspondances dans le sonnet éponyme (du même nom) où « Les parfums, les couleurs et les sons se répondent ».

Caractéristiques

Sa poésie mêle langage savant et parler quotidien. Rompant avec un romantisme qui, depuis un demi-siècle, loue la Nature jusqu’à la banaliser, elle célèbre la ville et plus particulièrement Paris, que métamorphosent alors les travaux d’Eugène Haussmann. Sur le plan formel, la poésie baudelairienne s’inscrit dans une filiation relativement classique (emploi du sonnet, pièces en décasyllabes, en octosyllabes, figures de style telles que la métaphore, l’anaphore, l’antithèse et l’oxymore – voir un petit rappel sur les figures de style essentielles juste ici.

Néanmoins, c’est surtout le point de vue adopté par le poète et son rôle qui constituent l’originalité de l’écrivain. Il s’agit pour Baudelaire de capter à l’aide d’images les symboles dont nous sommes entourés et que nous ne percevons pas. Baudelaire propose ainsi au lecteur d’être « un traducteur, un déchiffreur » (Réflexions sur quelques-uns de mes contemporains, 1860).

Réception des Fleurs du Mal

À la parution de l’œuvre, Les Fleurs du Mal a été censuré et Baudelaire condamné par le tribunal correctionnel de Paris pour outrage aux bonnes mœurs. Six poèmes ont été retirés, car jugés choquants pour la morale publique. En effet, Baudelaire met par exemple en scène la poétesse de la Grèce antique, Sappho, homosexuelle, dans des poèmes érotiques.

Le recueil est paru la même année que Madame Bovary de Gustave Flaubert, roman majeur du XIXe siècle, qui a échappé à la censure demandée par la même personne que pour Les Fleurs du Mal, maître Pinard. Profondément déçu par l’accueil de son œuvre, Baudelaire poursuit toutefois son œuvre ; ce n’est qu’en 1949 que ces six poèmes sont réhabilités. Pour lui, l’être humain vit une perpétuelle tragédie dans une dualité qui le déchire entre son aspiration pour le bien et le Ciel, et sa tentation pour le mal et l’Enfer.

Les différentes éditions des Fleurs du Mal

Comme nous l’avons évoqué un peu plus tôt dans cet article, en 1857, une première édition des Fleurs du Mal est publiée. Cette première édition comprenait 100 poèmes répartis en 6 sections : Spleen et Idéal, Tableaux parisiens, Le Vin, Fleurs du Mal, Révolte et La Mort. Toutefois, cette version a rapidement été victime de censure et 6 poèmes ont été supprimés. Baudelaire a quant à lui été condamné à une amende.

En 1861, Baudelaire a publié une deuxième édition, comprenant 14 nouveaux poèmes  et des modifications mineures apportées à certains des poèmes de la première édition. Mais cette deuxième édition a également été censurée et certains poèmes ont été supprimés.

En 1866, une troisième édition a été publiée, comprenant 30 nouveaux poèmes et des modifications encore une fois. Et encore une fois, cette édition a été censurée et des poèmes ont été supprimés.

Enfin, en 1868, une quatrième édition a été publiée avec tous les poèmes de la troisième édition et des nouveaux. Publiée après la mort du poète, c’est la version qu’on connaît aujourd’hui, autorisée sans censure cette fois-ci.

Les six sections des Fleurs du Mal

Les Fleurs du Mal peut être considéré comme un « bouquet » de poèmes soigneusement arrangés et accordés entre eux. La structure du recueil obéit à une logique interne, qu’il est intéressant de connaître pour bien s’y repérer.

Le recueil de poèmes est composé de six parties distinctes, qui évoquent chacune des thèmes différents :

Spleen et idéal

La section Spleen et Idéal (poèmes I à LXXXV) explore les thèmes de la mélancolie, de la tristesse et de la nostalgie, ainsi que ceux de la beauté, de l’amour et de l’inspiration. Ces deux concepts sont les deux faces d’une même pièce et s’opposent l’un à l’autre.

Le spleen est une sensation de mal-être, une mélancolie profonde qui envahit l’âme et le corps. Il est causé par la solitude, l’ennui, l’angoisse et l’incertitude face à l’avenir. Baudelaire explore ce sentiment dans des poèmes comme Spleen, La Destruction, et Le Léthé.

L’idéal, quant à lui, est un concept qui renvoie à l’idée de perfection, de beauté et d’harmonie. Il est associé à la quête de l’absolu et de l’éternité. Baudelaire explore ce thème dans des poèmes comme L’Idéal, L’Irrémédiable, et La Beauté.

Ces deux concepts sont intimement liés chez Baudelaire, car l’idéal est souvent une réponse à la souffrance causée par le spleen. C’est pourquoi, dans la section Spleen et Idéal, Baudelaire explore ces deux thèmes en alternance, montrant comment ils sont liés et s’influencent mutuellement.

Tableaux parisiens

La section Tableaux Parisiens (poèmes LXXXVI à CIII) se compose de poèmes qui décrivent la ville de Paris et ses habitant(e)s, ainsi que la vie nocturne et la modernité de la ville du XIXe siècle.

Cette section explore la beauté et la laideur de Paris, montrant comment la ville est à la fois fascinante et effrayante. Les poèmes de cette section dépeignent la ville sous différents angles. Certains poèmes décrivent les rues, les ponts et les monuments de Paris… Parmi les poèmes les plus connus de cette section, on peut citer Le Spleen de Paris, À une passante, Le Cygne et Les Sept Vieillards.

Le vin

La section Le vin (poèmes CIV à CVIII) est une célébration de l’ivresse et du vin, des thèmes récurrents dans la poésie de Baudelaire. Le vin est perçu comme une source d’inspiration, de plaisir et de liberté (voir sur ce thème Alcools, de Guillaume Apollinaire).

Baudelaire y décrit l’ivresse comme un état de transcendance, où l’homme peut s’évader de la réalité et trouver un refuge dans les plaisirs de la chair et de l’esprit. Il célèbre les différentes formes de vin, du vin rouge au champagne en passant par le vin de Tokay et le vin de Chypre. Parmi les poèmes les plus connus de cette section, on peut citer Le Vin de l’assassin, Le Vin des amants et Le Vin de la solitude.

Fleurs du Mal

La section Les Fleurs du Mal (poèmes CIX à CXVII) regroupe des poèmes qui explorent la condition humaine et les aspects les plus sombres de la vie. Baudelaire y décrit l’angoisse existentielle, la souffrance, la mort et la déchéance, en explorant les thèmes de la solitude, de la maladie et de la dépression. Il y exprime sa vision du monde comme étant intrinsèquement cruel et injuste.

Parmi les poèmes les plus connus de cette section, on peut citer Une Charogne, La Beauté, L’Albatros et Une Saison en Enfer.

Révolte

La section Révolte (poèmes CXVIII à CXX) concentre des poèmes qui expriment la révolte de Baudelaire contre la société, la morale et les conventions de son époque. Elle explore les thèmes de la liberté, de la rébellion et de la subversion, en montrant comment l’art peut être un moyen de s’opposer à l’ordre établi.

Baudelaire y critique la bourgeoisie, la religion, la politique et la morale conventionnelle, en montrant comment ces institutions étouffent l’individualité et l’expression de soi. Il exprime sa vision d’une société corrompue et hypocrite, qui ne permet pas à l’individu de s’épanouir pleinement.

Parmi les poèmes les plus connus de cette section, on peut citer L’Horloge, Le Léthé et La Beauté du diable.

La mort

Enfin, La mort (poèmes CXXI à CXVI) fait office de bilan, qui oscille entre impasse et ultime espoir. Cette section exprime la fascination de Baudelaire pour la mort, en montrant comment elle peut être à la fois effrayante et séduisante.

Baudelaire y explore les thèmes de la mort physique, de la mort de l’amour et de la mort de l’art, en montrant comment ces morts sont inséparables de la condition humaine. Il exprime sa vision d’un monde qui est marqué par la mort, en montrant comment l’art peut être un moyen de transcender cette condition.

Parmi les poèmes les plus connus de cette section, on peut citer “La Mort des amants”, “Le Léthé” et “Une Charogne”.

Les grands thèmes de l’œuvre

Les Fleurs du Mal sont ancrées dans plusieurs courants littéraires : le romantisme, le symbolisme et le surréalisme. Voici à ce propos un petit rappel des courants littéraires. À travers le lyrisme, l’expression du moi, le poète met en avant ses sentiments personnels et intimes, souvent liés à l’amour. Baudelaire raconte ainsi dans ses poèmes la déception amoureuse (la séparation, l’amour impossible, la perte de l’être aimé), mais aussi la mélancolie (tristesse profonde), la nostalgie (qui a trait à la fuite du temps) et la solitude.

En cela, Baudelaire est également une figure de proue du romantisme noir, car il s’inspire du pittoresque et du fantastique issus du Moyen-Âge, du roman gothique anglais du XIXe siècle (lié notamment à l’œuvre d’Edgar Poe).

Le thème de la ville dans Les Fleurs du Mal

Dans la section des Tableaux parisiens, Baudelaire explore la vie dans la ville de Paris, offrant une vision réaliste et poétique de la société urbaine de son époque à travers une série de poèmes. Il décrit avec minutie les divers aspects de la ville ainsi que les personnes qui la peuplent. Il capture l’atmosphère des scènes de la vie quotidienne, des quartiers sombres, des cafés animés, des rues fourmillantes et de la foule anonyme. Son objectif est de représenter la modernité dans toute sa complexité, en mettant en lumière les aspects attrayants et les côtés sombres de la vie citadine.

Ce qui caractérise particulièrement la représentation de la ville par Baudelaire, c’est son souci du détail. Il utilise des descriptions minutieuses pour évoquer les lieux et les individus, créant ainsi une atmosphère immersive pour le lecteur. Il esquisse des portraits frappants de la foule, en détaillant les visages, les comportements et les mouvements des personnes au sein de l’agitation urbaine. Ces poèmes révèlent souvent un sentiment d’aliénation et d’isolement dans la ville, exprimant la solitude, l’anonymat et la déshumanisation inhérents à la vie urbaine.

Baudelaire explore également les contrastes qui parsèment la vie citadine, notamment ceux entre la beauté et la laideur, la richesse et la pauvreté, la lumière et l’obscurité, mettant en évidence les tensions et les contradictions inhérentes à cette existence. Sa démarche ne se limite pas à décrire l’environnement urbain, mais utilise la ville comme un prisme à travers lequel il examine la condition humaine et la société. Il dénonce les vices et les corruptions dissimulés dans les recoins de la ville, tout en manifestant une fascination pour son dynamisme et son énergie.

Le traitement du thème de la ville dans Les Fleurs du Mal reflète la modernité de Baudelaire et son intérêt pour la réalité urbaine en pleine évolution à son époque. Il anticipe ainsi le mouvement littéraire du symbolisme, qui se penchera davantage sur les aspects psychologiques et symboliques de la vie citadine.

Qu’est-ce que l’alchimie ?

Dans sa définition première, l’alchimie désigne une science occulte en vogue au Moyen Âge, née de la fusion de techniques chimiques gardées secrètes et de spéculations mystiques. Il s’agit d’un processus visant à transformer des matériaux non précieux (notamment des métaux « vils » tels que le plomb) en argent ou en or.

Alchimie poétique : la boue et l’or

Dans l’appendice (ensemble de notes et de remarques à la fin d’un ouvrage) des Fleurs du Mal, Baudelaire a écrit : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or ». Si l’on parle ici d’alchimie poétique, c’est pour mettre en avant le processus d’écriture de Baudelaire, qui se compare à un « parfait chimiste ».

On peut alors voir directement la capacité de ce dernier à employer et manier les mots de telle sorte que ceux-ci, par le biais de la poésie, se transforment en or, en quelque chose de beau, même si les mots employés (les matériaux) et les sujets évoqués ne le sont pas originellement. Il s’agit donc de créer quelque chose de beau à partir de mots, de sujets qui ne le sont pas.

Mentions de ces deux éléments dans le recueil

Dans l’adresse « Au lecteur », au début du recueil, cette opération de transmutation, l’alchimie, est évoquée dans la troisième strophe à travers les termes de « Satan Trismégiste » (qui signifie « Satan trois fois grand » en référence à Hermès Trismégiste, dont les alchimistes se réclament). On retrouve également les expressions « riche métal » (l’or), ou « ce savant chimiste ».

On trouve même une mention du « chemin bourbeux » emprunté par le poète. La notion de « chimie » poétique voire d’« alchimie » traverse donc le recueil de part en part, du début à la fin.

On peut faire référence aux « Sept Vieillards » (« Dans la neige et la boue il allait s’empêtrant »), au « Vin des chiffonniers » (« Au cœur d’un vieux faubourg, labyrinthe fangeux ») ou encore à « Brumes et pluies » (« Ô fin d’automne, hivers, printemps trempés de boue,/ Endormeuses saisons ! Je vous aime vous loue. »).

Ce ne sont ici que quelques exemples que l’on pourrait multiplier. La boue est manifestement un thème que l’on ne peut manquer dans la poésie de Baudelaire, car littéralement, dans le Paris du XIXe siècle, on marche dans la boue, d’où sans doute son omniprésence.

La quête du poète : transformer la boue en or

La boue est une métaphore désignant aussi bien ce qui est sale physiquement (le Paris du XIXe siècle) que moralement (ceux qui habitent cette ville). Ainsi, la boue a partie liée avec le mal, avec la misère sociale dans « Le Vin des Chiffonniers » par exemple ou encore ans les deux « Crépuscules » où l’on croise « catins » (autre nom pour les prostituées) et « escrocs » (dans le poème « Le Crépuscule du soir »). S’y expriment les « rêves malfaisants », « la lésine » (dans le poème « Le Crépuscule du matin »). En somme, Paris devient chez Baudelaire le lieu allégorique du théâtre du mal dans la section des Tableaux parisiens ou du Vin. Ici, le temps, la vieillesse et la Mort sont omniprésents.

Il appartient toutefois au poète de sublimer cette matière, ce que montre le poème « Le Soleil » dans lequel l’astre transforme le réel :

Quand, ainsi qu’un poète, il descend dans les villes, Il ennoblit le sort des choses les plus viles, Et s’introduit en roi, sans bruit et sans valets, Dans tous les hôpitaux et dans tous les palais.

En outre, le poème « Correspondances », exprime l’idée d’un lien entre les contraires : « Dans une ténébreuse et profonde unité, / Vaste comme la nuit et comme la clarté, / Les parfums, les couleurs et les sons se répondent ». Dans ces vers, les opposés (la nuit et la clarté) sont donc indissociables (le poète parle bien d’unité). On pourrait multiplier les exemples qui soulignent l’entrelacs de la boue et de l’or, du beau et du laid. On peut évoquer également les nombreux oxymores tels que la « superbe carcasse » dans « Une Charogne », à leur coordination (« […] noire et pourtant lumineuse » dans « Un Fantôme »), ou encore au titre qui fait de la beauté une fleur du mal.

Le projet poétique est inscrit dès le titre dans l’alliance de ce nom (« fleurs » connoté méliorativement, c’est-à-dire de manière positive) et de ce complément (« du mal » connoté péjorativement). Dans « Une charogne », une comparaison du cadavre est faite avec une fleur. Ce poème est un excellent exemple permettant de mettre en avant l’opposition, la dualité entre la boue (le mal, le sale) et l’or (la beauté). Baudelaire fait en ce sens une hypotypose de l’objet afin que l’on voie la charogne.

Un exemple de poème d’alchimie poétique, « Une charogne »

Structure du poème

Le poème « Une charogne » (une charogne est un corps de bête morte ou cadavre en putréfaction) fait partie de la section Spleen et Idéal. Il s’agit du poème XXVII. Son schéma de rimes est : ABAB (rimes alternées) et celui-ci permet à l’auteur de créer un contraste entre le spleen et l’idéal. La ponctuation s’amplifie et s’accélère à mesure que le poème avance, et en dévoile de plus en plus sur la violence de l’opposition entre la femme et la mort.

Thèmes et analyse

Les champs lexicaux dans ce poème sont les suivants : la mort, la charogne, mais aussi tout ce qui a trait à un univers onirique (qui se rapporte aux rêves), idyllique, charnel et mélioratif.

Dans ce poème, Charles Baudelaire se souvient d’une promenade faite avec l’être aimé au cours de laquelle il trouva une charogne, en état avancé de décomposition. S’ensuit une transfiguration poétique qui permet au poète de comparer cet objet trivial et dégoûtant à un microcosme vivant en utilisant tous les outils lyriques de la rêverie poétique. Il compare également cette charogne à la femme courtisée, en développant le thème du Memento mori (locution latine qui signifie « Souviens-toi que tu vas mourir » qui rappelle la finitude de l’homme).

Baudelaire joue avec la dissonance esthétique d’une description précise de l’animal mort et les charmes du désir et des femmes. L’antonymie des deux atmosphères est caractéristique du recueil en rappelant l’opposition entre le Spleen et l’Idéal, en rendant l’objet poétique, son poème, beau, alors que paradoxalement le sujet abordé ne l’est pas. Le poète joue sur le paradoxe de la beauté de la forme (le texte) et celle des mots employés, qui contraste avec la laideur des objets évoqués, transformant alors la boue en or.

Lire aussi : Juste la fin du monde, résumé et analyse de l’œuvre

La portée des Fleurs du Mal dans la littérature

L’œuvre de Charles Baudelaire a eu une portée considérable sur la littérature, la poésie et même l’art au sens large. Il s’agit d’un recueil de poèmes qui est perçu comme un tournant pour la poésie moderne. Cette modernité, qui a largement marqué la postérité de l’œuvre, repose sur différents piliers :

  • L’exploration des extrêmes chez l’homme : Baudelaire est un des premiers à utiliser les thèmes les plus sombres et les plus provocateurs dans son œuvre. Mélancolie, mort, ennui, sexualité ou encore décadence, l’auteur témoigne et exprime les pulsions interdites et donne une voix à la marginalité et à la complexité de l’expérience de l’homme. Il ouvre alors la voie à d’autres auteurs pour ensuite faire de même.
  • Le renouvellement poétique : autant sur le fond que sur la forme, Baudelaire a utilisé des formes stylistiques nouvelles, qui se détachent des procédés utilisés pour la poésie de l’époque. L’appel à des images audacieuses a ainsi ouvert la voie à une poésie plus moderne, poussée vers de nouvelles expérimentations formelles et esthétiques.
  • La notion de modernité : les thèmes utilisés par Baudelaire dans son œuvre sont la marque de sa modernité. Il lui ont permis d’exprimer une vision de la société en mutation dans lequel il évoluait, et de l’aliénation de l’homme dans cette urbanité grandissante au profit de l’industrialisation et de la Modernité. Désorienté, privé de ses repères, Baudelaire illustre le sentiment d’isolement et de perdition de l’individu face à la modernité.
  • Son influence sur l’art : Les Fleurs du Mal, en plus d’avoir influencé la littérature au sens large, ont aussi eu un impact considérable sur l’art et les réflexions philosophiques. Beaucoup d’artistes ont été inspirés par les œuvres du poète, en France comme à l’étranger. Transgression des normes, quête du sublime ou encore aspect éphémère de la beauté ont influencé le symbolisme ou le surréalisme.

Les nouvelles techniques poétiques utilisées, comme les thèmes employés dans les différents poèmes ont fait des Fleurs du Mal une œuvre majeure qui a laissé une empreinte durable dans l’histoire littéraire, et continue de marquer pour sa modernité.

Le symbolisme de Baudelaire dans l’histoire des arts

On l’a dit, Baudelaire est très lié aux milieux artistiques de son époque, en particulier celui des peintres, tels que Courbet, Delacroix ou Manet. Il sera même critique de peintures. Nous te proposons donc ici quelques exemples de tableaux en lien avec Les Fleurs du Mal. Baudelaire est en effet un des précurseurs du symbolisme, un mouvement artistique européen qui se développe dans les années 1870 et qui atteint son apogée dans les années 1890. Ce mouvement apparaît d’abord en poésie avant de gagner la peinture, la musique et le théâtre.

Les thèmes mis en avant par les symbolistes

Un certain nombre de thèmes sont communs à tous les artistes : un fort pessimisme, une attirance pour le rêve et l’ésotérisme (l’ensemble des enseignements secrets réservés à des initiés), et une atmosphère générale de mélancolie. Le symbole de la femme fatale, très souvent interprété par les symbolistes, s’accompagne d’une forte misogynie dans le mouvement. Enfin, la recherche d’une synthèse des arts donne lieu à de nombreux échanges entre des artistes de différents domaines, et le symbolisme se répand dans tous les genres.

L’idée importante est qu’il faut arriver à déchiffrer les symboles de notre monde, autour de nous. Les symbolistes sont attachés aux sensations, aux impressions. Ils font des liens entre les sons, les images. Les poètes développent l’idée que les sons sont connectés, c’est la synesthésie. Ainsi, les correspondances entre les sens, le travail et le rythme des sonorités dans un poème symboliste sont essentielles. Il s’agit de poèmes évocateurs, qui favorisent beaucoup l’imaginaire, qui présentent également des métaphores à décrypter.

On retrouve par conséquent un certain nombre de thèmes qui sont liés à la mythologie (grecque et romaine), souvent revisitée, l’architecture antique. Le mystique (force supérieure au-dessus de nous), le mystérieux sont autant de clés pour comprendre le symbolisme poétique.

Quelques œuvres picturales qui symbolisent ce mouvement littéraire

Le symbolisme apparaît à la fin du XIXe siècle, alors que l’Europe connaît un essor scientifique et industriel important, qui entraîne un recul de la spiritualité. Voici quelques œuvres qui te permettront d’explorer plus avant ce courant. Parmi elles, on peut citer celle du peintre autrichien Gustav Klimt, en particulier la Danseuse. Il s’agit d’une huile sur toile peinte en 1916 (non exposée car faisant partie d’une collection particulière).

Par ailleurs, on peut également évoquer, Les licornes, de Gustave Moreau, une huile sur toile peinte entre 1887 et 1888, exposée au musée Gustave-Moreau à Paris. Odilon Redon, Les Chevaux d’Apollon, 1910, aquarelle, musée d’Orsay, Paris.

Pour conclure, le recueil peut se lire comme un douloureux parcours de réussir l’entreprise alchimique, mais il serait faux de l’y réduire tant il est vrai que le recueil des Fleurs du Mal abonde en poèmes qui illustrent la beauté des choses, les trésors de la mémoire, le temps retrouvé. Dans cette entreprise, le poète parvient à sublimer la laideur de la société, en valorisant ceux qui sont exclus, à la marge.

Lire aussi : Gargantua de François Rabelais, résumé et analyse de l’œuvre

Un quiz pour réviser Les Fleurs du Mal

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