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HGGSP : persistances et mutations des enjeux alimentaires

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Dans cet article, nous faisons le point avec toi sur les persistances et les mutations des enjeux alimentaires de notre société, point important de ton programme de HGGSP. N’hésite pas à prendre quelques notes !

Le 15 novembre 2022, l’humanité a franchi le seuil symbolique de 8 milliards d’êtres humains sur Terre. Au même moment, se tient en Égypte, à Charm el Cheikh, la COP27, où les pays du monde entier se réunissent pour tenter de répondre au changement climatique et de limiter la hausse moyenne de la température à la surface du globe à +2°C[1] d’ici 2100 par rapport à l’ère préindustrielle (XIX). Or, l’agriculture est responsable de 23% des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial, et subit de plein fouet les conséquences du changement climatique (augmentation de la fréquence et de l’intensité des épisodes extrêmes comme les sécheresses, les inondations notamment). Dès lors, comment parvenir à nourrir une population toujours plus nombreuse d’une part, de 8 milliards d’êtres humains aujourd’hui et probablement 11 milliards en 2050, tout en réduisant l’impact et la vulnérabilité de l’agriculture au changement climatique d’autre part ? 

La demande ne cesse de croître

En partie due à l’augmentation de la population à l’échelle mondiale mais pas seulement (on le verra), la demande en produits alimentaires ne cesse de croître. L’augmentation de la démographie et du niveau de vie fait envisager une augmentation de la demande en nourriture d’1/3 entre 2020 et 2030. La faim est toujours un problème d’actualité, avec 828 millions de sous-nourris dans le monde, soit un habitant de la planète sur 10.

Les progrès ont pourtant été considérables, grâce à la protection sociale, à l’aide aux petites productions, la lutte contre les carences infantiles et les moyens mis pour progresser sur les Objectifs mondiaux de Développement (OMD) fixés par l’ONU en 2000. Ainsi, la faim dans le monde touchait un milliard de personnes en 1990, mais 821 millions en 2017. L’Asie est pour beaucoup dans cette baisse, mais représente encore 2/3 des sous-nourris, et l’Afrique 1/3, avec une hausse de 170 millions à 234 millions entre 1990 et 2017. Ces progrès considérables ont donc été insuffisants vu les chiffres actuels, et même dans les pays en voie de développement (plus riches que les pays les moins avancés, ou PMA), un enfant sur trois est en insuffisance pondérale. Et les crises récentes (Covid, guerre menée par la Russie en Ukraine alors que la Russie et l’Ukraine sont respectivement les 1er et 5ème exportateurs de blé dans le monde) ont fait repartir ce chiffre à la hausse, passant de 821 millions de personnes souffrant de la faim en 2017 à 828 millions en 2021. Cette persistance de la malnutrition a un impact direct sur la richesse mondiale, faisant diminuer le PIB mondial de 5% environ, et sur les flux migratoires : une augmentation de la faim dans le monde de 1% entraîne une augmentation des flux migratoires de 2%.

Cette hausse de la demande en produits alimentaires n’est pas seulement tirée par la hausse de la demande de la population mondiale pour se nourrir, mais également par l’utilisation croissante des productions agricoles pour des usages non alimentaires : 40% du maïs des USA et la moitié de la canne à sucre au Brésil servent à produire des agrocarburants, qui font augmenter les prix des productions agricoles (hausse du prix estimée entre +30% et +50%). Ainsi, les prix alimentaires se connectent à ceux de l’énergie, ce qui favorise le maintien d’une insécurité alimentaire[2], qui concerne encore une cinquantaine de pays aujourd’hui.

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Les conséquences sanitaires de la transition alimentaire

L’urbanisation croissante des sociétés à l’échelle mondiale (plus de la moitié de la population mondiale vit en ville aujourd’hui) a entraîné le passage d’une autoproduction rurale à une alimentation industrielle (plusieurs intermédiaires nécessaires entre le producteur agricole à la campagne et le consommateur final en ville). Cette transition vers une alimentation industrielle a engendré une convergence de la consommation alimentaire vers des produits standardisés par les grands groupes du secteur agro-industriel[3] pour réaliser des économies d’échelle[4]. Or ces produits standardisés sont riches en sucre et en graisses (moins chers), ce qui favorise le surpoids, qui touche aujourd’hui 1,9 milliards de personnes (39% des adultes), dont 650 d’adultes obèses (340 millions d’adolescents et 39 millions d’enfants). Leur nombre a été multiplié par quatre dans les pays en développement.

Cette standardisation de la production alimentaire n’a pas eu que des effets négatifs, ayant permis à travers les normes qui lui ont été imposées, une amélioration de la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale (les produits contrôlés ne contenant alors pas de bactéries mortelles, en théorie), ce qui est un progrès majeur (aujourd’hui encore, l’insécurité alimentaire fait trois millions de morts par an, dont la majorité due à des produits non issus des systèmes industriels). Toutefois, du fait de la production à grande échelle, si un produit est contaminé, il touche bien plus de monde. Les scandales de la vache folle et de la bactérie e-coli ont mis en lumière d’importants problèmes de traçabilité.

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Le rôle des pouvoirs publics

Ainsi, pour réduire la faim dans le monde, mais aussi garantir la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale (par l’imposition de normes et de contrôles stricts), les pouvoirs publics ont un rôle déterminant. Cependant, la multiplicité croissante des acteurs de la nutrition (par l’augmentation du nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur final notamment) limite l’efficacité de l’action publique. En effet, la nutrition regroupe les acteurs de la production (agriculteur), de la transformation (Nestlé, Coca-Cola, etc.), de la distribution (Carrefour, Walmart, Auchan, etc.) mais aussi de la santé, de l’environnement, de la recherche (que ce soit pour créer des pesticides, des engrais chimiques ou au contraire trouver des modes de production plus écologiques et durables), de l’éducation…

Or, le rôle des pouvoirs publics est déterminant, car les marchés internationaux de l’alimentation sont nécessaires, mais insuffisants pour assurer la sécurité alimentaire de l’ensemble de la population mondiale, ce qu’a mis en lumière la crise alimentaire de 2008 : la flambée des prix due à la hausse de la demande asiatique avait engendré des émeutes de la faim, au Maghreb et au Mexique notamment. Pour la FAO (Food and Agricultural Organisation, qui appartient à l’ONU), cette crise était « une réponse à l’essoufflement d’un modèle fondé sur la division internationale du travail et de la répartition des productions », la FAO encourageant alors la production locale et l’anticipation des crises alimentaires. Sur ce plan de l’anticipation, la situation mondiale s’est améliorée, avec une coordination mise en place par le G20 en 2011 avec le système AMIS (système d’information sur les marchés agricoles) et la constitution de stocks, permettant de lisser les prix.

[1] L’accord de Paris de 2015 (COP21) prévoyait une limitation de la hausse à +1,5°C dans le meilleur des cas, mais cet objectif n’est déjà plus atteignable d’ici 2100 sept ans plus tard, en 2022, mettent en garde les scientifiques.

[2] Défaut d’accès stable pour l’ensemble de la population d’un pays à une nourriture en quantité suffisante et sans risque sanitaire (qualité).

[3] Secteur qui transforme les produits bruts fournis par les agriculteurs (par exemple le chocolat) et produits de consommation finale (barres chocolatées, gâteaux, etc.).

[4] Produire en grande quantité (c’est-à-dire à grande échelle) permet d’augmenter le nombre de produits fabriqués par une même machine, et donc de faire baisser le prix de vente du produit final tout en gagnant plus car plus de produits, certes moins chers, sont vendus. Un produit coûte alors moins cher à produire (on parle de coût unitaire) lorsqu’on produit à grande échelle, d’où l’expression d’« économies d’échelle ».

 

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