Imaginez-vous être championne de rugby et étudiante en première année de master en journalisme. Difficile à croire, et pourtant, Morgane Bourgeois en est la preuve : tout est possible. Ambassadrice pour le rugby féminin, elle a accordé une interview à AuFutur pour nous parler de son parcours fulgurant et unique en son genre.
« Faire du rugby est comme une forme d’héritage »
Bonjour Morgane, pourrais-tu te présenter brièvement et nous expliquer comment le rugby est devenu une évidence pour toi ?
Je m’appelle Morgane Bourgeois, j’ai 21 ans, je suis reliée au stade bordelais et je suis également double championne de France de rugby féminin. J’ai commencé le rugby à 10 ans. C’est dû à ma famille, qui est très engagée dans le rugby, surtout mon père et mon frère.
Ton parcours montre une forte influence familiale dans ton choix du rugby. Peux-tu nous parler de l’importance de ta famille dans ton évolution sportive ?
Je suis très bien accompagnée par mes parents et ma famille de manière générale. Leur soutien est hyper sain et très précieux pour moi. Faire du rugby est comme une forme d’héritage aux yeux de ma famille, mais je ne ressens pas la pression.
Tu as d’abord pratiqué le football avant de te tourner vers le rugby. Qu’est-ce qui t’a poussée à franchir le pas et à te lancer pleinement dans ce sport ?
Petite, j’ai fait du foot pendant 4 ans et demi. Ça m’a permis d’acquérir beaucoup de qualité quant à la gestion et à la vision du jeu. Au début, quand je jouais au rugby, j’étais timide avec les garçons, mais c’est vite passé.
« J’ai évolué dans cette équipe et arriver au titre de championne a été une fierté »
Quels moments marquants retiens-tu de ta carrière jusqu’à présent ? (Équipe de France U20, brassard de capitaine, sélection en Irlande, titres de championne de France…)
Je dirais que celui qui me vient immédiatement en tête est celui de mon surclassement pendant la période du COVID où j’ai fini dans la catégorie des seniors. Je pense aussi à ma première sélection, le 1er avril 2023, par l’équipe de France, et aussi à notre victoire collective en 2023 des titres de championne de France. J’ai évolué dans cette équipe et arriver au titre de championne a été une fierté.
Tu évoques souvent l’esprit collectif du rugby. Qu’est-ce que ce sport t’a appris sur toi-même et sur la manière de travailler avec les autres ?
J’ai toujours fait des sports collectifs (foot et rugby), je suis une compétitrice, mais pas en individuel. J’ai besoin de ce partage d’équipe et de faire des rencontres inspirantes avec mes coéquipières pour me sentir complète.
Tu es à la fois étudiante en journalisme et joueuse de rugby de haut niveau. Comment parviens-tu à équilibrer ces deux ambitions exigeantes ?
Lors de mes 14 ans, j’ai commencé à être en sport-études, donc j’avais l’habitude de la charge de travail et la charge mentale jusqu’à maintenant. J’y ai trouvé mon équilibre facilement. Maintenant, je dirais qu’il me faut les deux choses : de m’aérer l’esprit avec le rugby et de découvrir de nouvelles choses avec le journalisme.
Le rythme de sport-études a dû être particulièrement intense. Quelles stratégies as-tu mises en place pour gérer la fatigue et rester performante dans les deux domaines ?
J’ai eu de la chance d’avoir des facilités à l’école, mais c’est difficile de trouver son propre rythme. Tout le monde doit bien dormir, boire, manger. On le répète souvent, mais c’est le plus important, ainsi que de récupérer, car le rythme est effréné.
Une évolution de la place des femmes dans le rugby professionnel
Le rugby féminin reste un défi sur le plan professionnel, comme tu l’as mentionné. Quelles sont selon toi les priorités pour permettre à ce sport de se développer davantage ?
Le sport féminin est en train de se développer, on le voit entre nous les joueuses. Rien que cette année, les affluences étaient de 12,000 à Clermont-Ferrand. 4 rencontres ont été télévisées sur Canal+ et c’est cette visibilité qui est importante. Je dirais que ce qu’il manque, ce sont des sponsors et des entreprises qui donneraient de l’argent aux clubs, aux joueuses pour améliorer les conditions du sport et des tournois.
Quels conseils donnerais-tu aux jeunes filles qui souhaitent se lancer dans le rugby tout en poursuivant des études ou une autre passion ?
À titre personnel, je n’ai jamais vu l’un sans l’autre. Le rugby féminin n’est pas professionnel. Sur les 350 joueuses, moins de 10% en ont une carrière et peuvent en vivre. La majorité des joueuses sacrifie de leur temps pour pouvoir y participer. Je dirais alors aux jeunes filles qui veulent se lancer de ne pas arrêter l’école. On dit que le rugby évolue et j’espère que les jeunes vivront ça, cette extasie, comme je l’ai vécue, mais en mieux.
Tu as des objectifs clairs pour l’avenir, comme retrouver ta place en équipe de France et remporter des trophées. Comment te prépares-tu mentalement et physiquement pour atteindre ces rêves ?
Mentalement, j’ai été suivie par des préparateurs mentaux pour contrôler ma gestion émotionnelle, les tirs au but, etc. Je ne me prends pas trop ma tête. Pour moi, le rugby, c’est du plaisir et un jeu. Physiquement, lors de mes entraînements, je suis acharnée de travail, donc je le fais le plus sérieusement et je continue avec le plus de qualité. C’est surtout le plaisir pour moi qui importe le plus.
À long terme, quelle place le journalisme pourrait-il occuper dans ta vie ? Penses-tu pouvoir concilier cette carrière avec ton implication dans le rugby ?
C’est l’objectif, je veux devenir journaliste. Quant au rugby, je dirais que tout dépendra de ma carrière sportive et des opportunités qui se présentent à moi. Je veux mener les deux de front, mais si je dois interrompre le journalisme pour mettre en avant ma carrière de rugby, je le ferai et si je peux aussi utiliser ma place en tant que future journaliste pour parler du rugby féminin, je le ferai également.