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HGGSP : les enjeux et défis de la France pour le XXIe siècle

À lire dans cet article :

La mondialisation est une thématique très importante de ton programme de spécialité HGGSP (histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques) en classe de terminale. Dans cet article, nous faisons le point avec toi sur les enjeux et les défis auxquels devra répondre la France au XXIe siècle. Euro-mondialisation, dette publique, aménagement du territoire, etc.

La France est très intégrée à la mondialisation, ce processus historique, pluriséculaire, de mise en relation des sociétés du monde entier, devenu un lieu commun à toute l’humanité. On l’a vu, cette intégration passe avant tout par l’Union européenne, on parle même d’euro-mondialisation (voir partie 1 – l’intégration européenne). En retour, ce processus de mondialisation recompose le territoire français en profondeur. Que ce soit à l’échelle nationale, régionale ou urbaine, des territoires sont valorisés et intégrés à la mondialisation quand d’autres restent plus en marge de cette intégration (voir partie 2 – des impacts territoriaux contrastés à plusieurs échelles). Dans ce contexte d’une insertion inégale de son territoire à la mondialisation, quels sont alors les enjeux et les défis qui se dressent pour la France au XXIe siècle ? La dichotomie entre « territoires gagnants » et « territoires perdants » de la mondialisation, à nuancer, entraîne des dilemmes d’aménagement du territoire.

Gagnants et perdants de la nouvelle donne territoriale

Des contrastes à toutes les échelles

La mondialisation apparaît désormais comme le principal facteur de compréhension des disparités territoriales.

Grossièrement, on peut distinguer quatre grands types de territoires « vainqueurs » (qui profitent de l’intégration de la France à la mondialisation, leur intégration à ce processus leur permettant de se développer économiquement) : les grands pôles urbains, les espaces agricoles productivistes (bassin céréalier de l’Île-de-France et autour, agriculture et élevage intensifs en Bretagne[1]), les clusters (qui regroupent des entreprises et des centres de recherche les alimentant pour les productions à haute valeur ajoutée (nouvelles technologies, médicaments…) et les littoraux dynamiques (par le rôle décisif des ports dans le commerce mondial d’une part, l’essor touristique d’autre part).

Cinq types de territoires apparaissent eux plutôt « perdants » de l’insertion de la France à la mondialisation (en étant mal intégrés, comme « oubliés ») : les espaces agricoles en difficulté, la diagonale du vide (large bande du territoire français de la Meuse au nord-est aux Landes au sud-ouest, où les densités de population sont plus faibles et l’accès aux emplois et services publics ainsi plus difficile), les vieilles régions industrielles (du nord et de l’est, en cours de reconversion), les villes petites et moyennes monofonctionnelles (avec au maximum une spécialisation), et les foyers portuaires en déclin, par polarisation (certains ports gagnants captant alors la majorité des flux, au détriment des autres ports).

Cette approche entre territoires gagnants et territoires perdants de la mondialisation est toutefois à nuancer. Laurent Davezies (économiste ayant travaillé pour la DATAR, la Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale) met en lumière qu’il y a sur certains territoires une disjonction entre l’insertion économique (la richesse produite sur ce territoire) et le développement local. Cette disjonction est notamment due au rôle de l’économie présentielle. Cette économie présentielle désigne la sphère économique qui repose sur la consommation des populations présentes, se distinguant des activités productives réalisées par les entreprises implantées sur un territoire (INSEE). Elle est due aux revenus de transfert (par les subventions publiques et les personnes résidant sur un territoire, mais travaillant ailleurs notamment). Par exemple, le Limousin (ancienne région appartenant désormais à la région Nouvelle-Aquitaine) a un PIB par habitant inférieur de 20% à la moyenne nationale, alors que le revenu par habitant après impôts et revenus de transfert est dans la moyenne française.

Autre nuance importante : l’inscription spatiale des difficultés est de plus en plus micro-géographique. Par exemple, les plus fortes inégalités sont visibles en Île-de-France, pourtant la région la plus dynamique à l’échelle nationale si on la prend dans son ensemble, responsable d’un tiers du PIB de la France. Le géographe Roger Brunet synthétise cette inscription multiscalaire des difficultés par la phrase « le territoire français a plus d’une pente ».

Les conséquences de la crise de 2008 et de la crise de la dette publique (2011-2012) qui a suivi

Les crises récentes ont accéléré ces modifications du territoire français. Celle de 2008 fait d’abord chuter la production (le PIB baisse de 3% entre 2008 et 2009[2]) mais la consommation se maintient (par les amortisseurs publics comme l’allocation chômage, le RSA, ou revenu de solidarité active, entre autres). Mais la crise de la dette souveraine (publique) explose en 2011 en Europe, l’État a alors moins de moyens pour les amortisseurs publics, ce qui engendre de nouvelles fractures territoriales. Laurent Davezies parle d’une « France à plusieurs vitesses » : une France marchande dynamique (les métropoles, insérées à la mondialisation et représentant 40% de la population française), une France non marchande dynamique(notamment au sud-ouest, tirée par l’économie résidentielle), une France marchande en difficulté (les territoires en déprise industrielle, notamment du nord et de l’est) et une France non marchande en difficulté(dépendant des dépenses publiques, comme dans la diagonale du vide).

Toutes ces recompositions du territoire dues à une intégration inégale au processus de mondialisation et aux crises que ce dernier engendre créent des dilemmes en termes d’aménagement du territoire.

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Les dilemmes de l’aménagement du territoire

Les dilemmes de l’aménagement sont dus à deux principaux facteurs : l’apparition de nouveaux acteurs aux côtés des acteurs historiques de l’aménagement du territoire d’une part, la difficulté de concilier compétitivité de la France dans la mondialisation et égale accessibilité (aux emplois, aux services publics) sur l’ensemble du territoire français. En effet, comme la mondialisation sélectionne certains territoires (cf. I, les métropoles par exemple) en en laissant d’autres de côté (les villes petites et moyennes monofonctionnelles), il est tentant de tout miser sur les territoires sélectionnés pour être toujours plus inséré, ce qui augmente la richesse à l’échelle nationale, mais cela favorise la déprise des territoires en difficulté.

De nouveaux acteurs

Le modèle d’État-nation très centralisé à la française (dit le modèle « jacobin », où la plupart des décisions sont prises à l’échelle nationale par l’État) est remis en cause par le haut avec l’Union européenne et par le bas avec la décentralisation. Celle-ci est notamment passée par les lois Defferre en 1982-83, l’Acte II en 2004 et l’Acte III en 2016, en faisant passer de l’État aux collectivités territoriales (communes, départements, régions classiquement) de nombreuses prérogatives (missions). Cela donne parfois l’impression d’une « millefeuille administratif » : concernant l’éducation par exemple, l’Etat reste en charge des programmes et des professeurs, mais la région s’occupe des bâtiments et équipements des lycées, le département de même pour les collèges et la commune pour les écoles. Et de l’autre côté, la France bénéficie de 18,4 milliards d’euros de la part de l’Union européenne pour renforcer la cohésion territoriale sur la période 2021-2027. Entre les deux, l’État reste un acteur important pour l’aménagement du territoire français, notamment à travers la BPI (Banque Publique d’Investissement).

L’enjeu de l’accessibilité

Le conflit entre compétitivité et accessibilité est illustré par les objectifs contradictoires du Réseau Transeuropéen de Transports (RTE-T), développé depuis 1994. En voulant réaliser un espace européen unifié, il doit à la fois renforcer les pôles les plus dynamiques (liaisons TGV Lyon-Turin, Paris-Frankfort-Berlin), et garantir à tous un niveau satisfaisant d’accessibilité (alors que le développement de liaisons TGV engendre un « effet tunnel », qui oublie les territoires situés entre les arrêts éloignés des TGV).

L’enjeu de la compétitivité

Après plusieurs décennies de politiques de réduction des déséquilibres spatiaux (création des universités de province, de plusieurs campus Sciences Po, déplacement de l’ENA en province, à Strasbourg), la priorité est désormais donnée au renforcement de la compétitivité des territoires, dans la logique de la mondialisation. D’où une baisse de la dotation de l’État aux espaces industriels en difficulté et la création à l’opposé des pôles de compétitivités en 2004 (54 pôles aujourd’hui, dont huit en Île-de-France).

Par cette course à la compétitivité se met en place une compétition entre les collectivités territoriales, qui mettent en place des stratégies de marketing territorial : Marseille a beaucoup profité de son image de « capitale européenne de la culture » en 2013.

 

Ainsi, les questions « comment concilier politique de compétitivité et politique de cohésion ? Si cela n’est pas possible, laquelle privilégier ? » se placent au cœur du débat des années à venir concernant l’aménagement du territoire français. Elles s’insèrent dans un contexte géopolitique qui, par la crise du Covid et la guerre de la Russie en Ukraine, a montré la nécessité de relocaliser les productions stratégiques (des médicaments par exemple) et la production d’énergie, qui passe en France par une production non carbonée, les ressources en pétrole et en gaz du territoire étant soit inexistantes, soit trop compliquées à exploiter. D’où les débats sur la production nucléaire, particulièrement développée en France, et la nécessité de développer massivement la production d’énergie renouvelable (éolien, solaire). L’urgence climatique bouleverse l’aménagement du territoire français, à la fois par les relocalisations nécessaires et par la multiplication d’événements climatiques extrêmes à venir.

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[1] Qui a su tirer profit de la PAC, la Politique Agricole Commune, mise en place par la Communauté Économique Européenne (CEE, ancêtre de l’Union européenne) en 1962. La PAC reposait sur des subventions aux agriculteurs pour augmenter leur production et atteindre l’autosuffisance alimentaire (produire autant que ce qu’on consomme) en Europe. Elle a « tellement bien marché » qu’elle a entraîné une crise de surproduction faisant chuter les prix et a conduit à la mise en place de quotas (limites) de production. Récemment, ces quotas ont été progressivement remis en cause et l’UE essaie de flécher les subventions de la PAC, moins nombreuses, vers les exploitations vertueuses environnementalement, mais le chemin est long à parcourir.

[2] On parle d’une récession quand l’évolution du PIB est négative, par opposition à la croissance.

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