Mers, océans: espaces de puissance

HGGSP : affirmer sa puissance à partir des mers et des océans

À lire dans cet article :

Dans cet article, nous faisons le point sur les mers et les océans, éléments importants de ton programme de spécialité HGGSP en classe de terminale.

« Tout potentat qui n’a que la puissance terrestre n’a qu’un bras. Mais qu’il y ajoute la puissance maritime, il a les deux. », Pierre le Grand (Tsar puis 1er empereur de Russie, 1682-1725). Les États s’affrontent depuis longtemps sur les océans (grandes étendues d’eau salée bordées par des continents) et les mers (plus petites et souvent moins salées) pour des raisons économiques (commerce et ressources maritimes) et stratégiques (les militaires parlent de « capacité de projection »). Ainsi, les espaces maritimes sont sources de puissance, celle-ci s’entendant comme la capacité d’un acteur à imposer ses choix aux autres, et qui repose sur cinq attributs principaux : avec le poids territorial, de la démographie et l’influence culturelle, le poids économique et le poids militaire (et donc diplomatique) sont des composantes essentielles de la puissance, pour lesquelles l’action maritime est essentielle.

La puissance maritime est une composante essentielle de la puissance militaire

Si la notion de puissance militaire est connue depuis l’Antiquité, réaffirmée au cours des siècles suivants comme en témoigne la citation de Pierre Le Grand, elle n’est théorisée qu’en 1890, par l’Amiral Alfred Mahan. Dans The Influence of Sea Power upon History, il affirme que la destinée des États-Unis, dominer le monde, passe par la maîtrise des océans. En 1889, la Grande Bretagne, alors première puissance maritime mondiale, affirme le Two-Power Standard, principe selon lequel sa flotte navale doit être égale à la somme des flottes des deux puissances maritimes suivantes, plus une majoration de 10%. Et pendant la Seconde Guerre mondiale, Nicholas Spykman, disciple de Mahan, construit une théorie de l’opposition entre la puissance maritime et la puissance continentale, luttant pour le contrôle des bordures continentales de l’Eurasie, enjeu majeur de puissance.

Avec la fin de la guerre froide, on assiste à un basculement de la logique de la puissance maritime : auparavant fondée sur les forces navales (nombre de navires de guerre, d’aéronefs et d’installations à terre), elle s’appuie désormais avant tout sur les espaces, l’enjeu étant d’en posséder ou à défaut d’en contrôler le plus possible. Toutefois, le contrôle des espaces repose sur les forces navales (ou marine de guerre), qui recouvre aujourd’hui quatre dimensions : sous la mer, à la surface, dans les airs et désormais dans l’espace (par les missiles balistiques et les satellites). En particulier, la possession de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) reste essentielle. Autre évolution majeure : la montée en qualité des forces navales permet aujourd’hui de réduire le nombre de navire tout en augmentant sa puissance maritime.

C’est notamment le cas des États-Unis, première puissance maritime mondiale, dont la supériorité reste écrasante depuis la fin de la guerre froide. Cette supériorité s’appuie, au-delà du nombre de navires qui reste important malgré les restrictions budgétaires, sur un réseau de bases navales et d’alliés dans le monde entier, ainsi que sur un système d’information et de communication très développé depuis les années 1990. Cette domination dans l’information passe notamment par le contrôle des câbles sous-marins (450 dans le monde, assurant 98% des communications internet), 80% des câbles transatlantiques étant détenus par les Américains, et des satellites, d’où le soutien de l’État Américain à Space X.

En Europe, seuls le Royaume-Uni et la France maintiennent leur marine parmi les premières à l’échelle mondiale, alors que la plupart des pays européens ont renoncé à la projection de puissance (capacité d’intervenir hors de ses frontières sans troupes au sol), s’abritant derrière la protection américaine assurée dans le cadre de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord). Les puissances maritimes traditionnelles se voient désormais concurrencées par les puissances émergentes, notamment la Chine, qui dispose de la deuxième flotte militaire mondiale (1,2 million de tonnes, contre 3 millions pour les États-Unis). L’immense câble « Peace » de 15 000 km, déroulé entre la France et le Pakistan en passant par l’Egypte et le Kenya, est financé par la Chine et fait la fureur des Américains.

Lire aussi : Spécialité HGGSP : les puissances internationales

La puissance maritime au service de la puissance économique

Si les espaces maritimes (mers et océans) sont essentiels à la puissance stratégique et militaire, leur dimension économique, qui a toujours existé, est prépondérante depuis les années 1990. Sur le plan commercial d’abord, surveiller les océans et les littoraux appuie l’objectif majeur de garantir la libre circulation des marchandises, selon le principe de liberté des mers, les marines militaires servant surtout à prévenir les crises. Ensuite, les espaces maritimes sont importants pour les ressources (hydrocarbures off-shore (au large des côtes), ressources halieutiques (pêche) notamment), avec les nouvelles possibilités d’exploration et d’exploitation. Ainsi, le principe de liberté des mers (les mers n’appartiennent à personne, principe affirmé par Hugo Grotius dans Mare Liberum (1609) a été remis en cause depuis la Seconde Guerre mondiale. En effet, la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (ou Convention de Montego Bay) en 1982 distingue trois zones de souveraineté pour les États au-delà de leur côtes. La plus large, la ZEE (Zone Économique Exclusive, 200 miles marins au-delà de la rive) donne des droits exclusifs d’exploration et d’exploitation de toutes les ressources naturelles (alors que tous les États peuvent y naviguer, survoler la zone et y déposer des câbles sous-marins). Les États-Unis disposent de la première ZEE mondiale, la France de la deuxième, par l’héritage colonial.

Lire aussi : La puissance des États-Unis aujourd’hui – Bac HGGSP

La contestation croissante des puissances maritimes

Étant décisifs tant pour la puissance militaire que la puissance économique, les espaces maritimes sont au centre d’enjeux multiples, ce qui alimente une contestation croissante des puissances maritimes. Les regards se tournent aujourd’hui avant tout vers la Chine. Non seulement du fait de l’augmentation de sa marine de guerre, mais également par sa tentative d’appropriation d’îlots en mer de Chine (Paracel etSpartleys notamment). Ce contrôle croissant de la mer de Chine pour en faire une « mer intérieure » recouvre des enjeux économiques (accroissement de la ZEE chinoise) mais aussi stratégiques, la Chine pouvant alors surveiller le trafic en mer de Chine, y compris celui des navires militaires. D’où les tensions croissantes autour de l’île de Taiwan, qui bénéficie d’une protection américaine, les États-Unis étant censés intervenir si la Chine décide d’envahir Taiwan. Par ailleurs, la volonté de la Chine est incertaine : son essor maritime se limite-t-il au contrôle de la mer de Chine, ou bien a-t-il vocation à affirmer sa présence dans l’Océan Indien ?

Les tensions entre puissances maritimes ne se limitent pas à la Chine et à sa rivalité avec les États-Unis. La Grèce et La Turquie se disputent, entre autres, les îles de la mer Egée. Et toutes les puissances maritimes doivent faire face à des menaces asymétriques (menace provenant de moyens non-conventionnels) comme la piraterie, qui se déploient près des principaux points de passage du commerce maritime mondial, notamment le détroit de Malacca puis au large de la Somalie.

Tu veux plus d’informations et de conseils pour réussir tes examens et trouver ton orientation ? Rejoins-nous sur Instagram et TikTok !

À la une