L’ancien présentateur de Questions pour un Champion, Samuel Étienne, a délaissé la traditionnelle télévision pour lancer sa propre chaîne sur Twitch. Au programme : une revue de presse quotidienne et des interviews en direct de chez lui. On se demande aujourd’hui si cette plateforme peut rendre attrayante l’interview politique.
Tu en as sans doute déjà entendu parler : la chaîne Twitch de Samuel Étienne a beaucoup fait parler d’elle récemment. D’abord, parce qu’on connaissait ce journaliste principalement pour son rôle d’animateur de Questions pour un Champion. Ensuite, parce qu’après avoir fait toute une carrière à la télévision, on ne s’attendait certainement pas à le retrouver sur une plateforme comme Twitch.
Twitch, permet de faire des live en temps réel. Notamment avec un chat qui permet un contact direct avec le public. La plateforme est traditionnellement utilisée par les gamers, qui jouent en direct devant leur public. La plateforme Twitch est souvent plébiscitée parce qu’elle permet la spontanéité. Et permet aussi aux streamers d’être proches de leur public. C’est notamment le cas pour Samuel Étienne, qui dialogue en direct avec le chat lorsqu’il présente sa matinale sur la plateforme.
L’interview politique de Samuel Étienne
Samuel Étienne ne se contente pas d’une revue de presse. Il reçoit aussi des invités en tout genre. Des musiciens comme le chanteur Zed Yun Pavarotti. Des illustrateurs aussi, comme la dessinatrice de presse Coco. Mais aussi, et c’est ce qui nous intéresse aujourd’hui, des interviews politiques. L’animateur a d’ores et déjà invité plusieurs personnalités politiques de premier plan. François Hollande, ancien président de la République est passé dans l’émission. Mais aussi Julien Bayou, porte parole du parti Europe Écologie Les Verts. Plus récemment, c’est Jean Castex, l’actuel Premier Ministre, qui était l’invité de l’émission.
Une interview qui a fait grand bruit puisqu’on attend chaque semaine des nouvelles de l’épidémie. L’idée était d’autant plus intéressante que jamais un membre de gouvernement ne s’était exprimé aussi près du « peuple ». Puisque, on le rappelle, c’est Samuel Étienne qui invite, mais c’est « vous », son public, qui posez les questions. Le format aurait donc dû permettre plus de spontanéité. Et ainsi mettre fin au traditionnel reproche que l’on adresse aux politiques lors des interviews : celui de la langue de bois. L’animateur souligne d’ailleurs cette liberté en début de live : « Pour moi, c’est un magnifique exercice de démocratie directe », dit-il.
Fin de la langue de bois ?
Malheureusement, l’interview n’est pas à la hauteur des attentes. Le Premier Ministre donne très peu d’informations que l’on ne connaît pas déjà. Notamment sur la possibilité d’un reconfinement en Île-de-France, qui inquiétait beaucoup à l’époque. « Pourquoi ne pas admettre ce que vous ne savez pas au lieu de vous mettre toujours dans une position de sachants, qui vous déconnecte plus que jamais des français ? » demande un internaute. Question intéressante, que Samuel Étienne adresse au Premier Ministre. Jean Castex répond qu’il dit toujours ce que « nous savons et ce que nous ne savons pas. » Chassez la langue de bois et elle revient au galop.
Les internautes qui regardaient le live n’ont d’ailleurs pas tardé à s’agacer dans les commentaires. Certains ont dit qu’ils s’ennuyaient, qu’ils étaient irrités par les banalités que disait le Premier Ministre. Et puis finalement, que ça ne servait à rien d’aller sur Twitch pour donner une interview digne du 20 heures de TF1.
Le bilan
Le lendemain, l’éditorialiste politique de France Culture, Frédéric Says, a posé cette question aux auditeurs : « What did you expect ? ». Puis d’expliquer qu’il était plutôt prévisible, en somme, qu’un Premier Ministre ne puisse pas être totalement franc. Surtout lorsqu’il est au beau milieu de l’exercice de ses fonctions. Cette impossibilité de se « lâcher » est due à la charge qui pèse sur ses épaules, bien sûr. Mais aussi et surtout, au fait que chacune de ses « petites phrases » peut être reprise dans les médias et commentée par les journalistes. Au risque de déclencher une polémique non désirée.
L’interview politique a par ailleurs toujours été jugée « pénible » par les téléspectateurs, explique Frédéric Says. Les journalistes ont, à plusieurs reprises, essayé de dynamiser ce format austère. L’exemple le plus parlant est l’émission de Thierry Ardisson. L’animateur y provoquait ses invités avec des questions sur leur vie personnelle. L’émission de Samuel Étienne n’est donc pas la première tentative de rendre une interview politique plus spontanée. Et moins « déconnectée » du public. Et visiblement, ce n’est pas non plus le premier échec.