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Les Fausses confidences, Marivaux : résumé et analyse

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Marivaux, célèbre pour son ton léger dans l’évocation de l’amour dans ses écrits et qui a donné naissance au terme de « marivaudage », est l’auteur de la célèbre pièce Les Fausses confidences. Celle-ci est jouée pour la première fois en 1737. Il s’agit d’une œuvre au programme du parcours « théâtre et stratagème » pour l’épreuve anticipée de français 2023, que nous te proposons d’étudier dans cet article.

Qui est Marivaux ?

Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, connu sous le nom de Marivaux, est né à Paris en 1688. Il grandit cependant à Riom dans une famille de la petite noblesse dans laquelle il reçoit une éducation soignée. Il s’installe à Paris en 1710, et étudie au collège de Beauvais, avant de commencer ces études de droit.

Marivaux peut être considéré comme un mondain raffiné, habitué des salons (réunion d’hommes et de femmes lettrés, bourgeois ou nobles à l’origine attirés vers les Belles-lettres et la poésie, la littérature et le théâtre, et souvent autrefois les arts et les sciences). Rapidement, il délaisse le droit et se tourne assez rapidement vers une carrière littéraire. Dès le début, il manifeste son engagement en faveur des “Modernes” et s’oppose donc aux “Anciens”, partisans des codes d’écritures traditionnels hérités de l’Antiquité.

Au début de sa carrière, il se consacre à l’écriture d’articles pour des revues ou journaux, avant d’accorder davantage de temps à l’écriture romanesque et au théâtre.  S’il écrit d’abord par plaisir, il doit toutefois rapidement en faire son gagne-pain et gagner les faveurs de mécènes (personne riche et généreuse qui aide et soutient financièrement les écrivains, les artistes), ayant perdu sa fortune dans la banqueroute de Law.

Beaucoup de pièces ont fait le succès de Marivaux en plus des Fausses Confidences (1737).  Notons par exemple le succès  d’autres œuvres, telles que les pièces Le Jeu de l’Amour et du Hasard (1730) et l’Île aux esclaves (1725) ou encore les romans La Vie de Marianne (1731-1742) et Le Paysan parvenu (1734).

Marivaux avait un style d’écriture particulier et notable, au point d’en avoir laissé un nom : le marivaudage. Le “marivaudage” consiste à privilégier les dialogues subtils et les jeux de mots, et caractérisé par des conversations légères et des scènes de réflexions amoureuses profondes. Comme beaucoup d’autres auteurs de son époque, Marivaux s’empare des questions sociales et politiques du XVIIIème siècle dans ses œuvres mais aussi au sein des cercles philosophiques des Lumières, qu’il fréquente et où il participait aux débats.

L’auteur meurt finalement en 1763, à l’âge de 75 ans.

N’hésite pas à aller consulter notre article dédié à une autre œuvre de Marivaux, la pièce L’île aux esclaves, qui te permettra d’enrichir tes références !

Contexte d’écriture des Fausses confidences de Marivaux

Au XVIIIe siècle, si les genres littéraires classiques sont encore en vogue, ceux-ci tendent cependant à évoluer. En effet, Marivaux en particulier se libère de la tradition de la comédie de Molière en élaborant une formule nouvelle de théâtre comique. Il y donne ainsi le rôle principal à l’analyse nuancée des sentiments amoureux et à la ruse. Subtilité, artifices, prisme d’une réalité superficielle sont les nouveaux mots d’ordre de ce genre nouveau de comique.

Cette pièce dénonce également la hiérarchie sociale à travers une réflexion sur les préjugés : le valet se révèle plus habile, adroit et malin que les personnages d’extraction noble et plus aisée, qui ont reçu une éducation. Marivaux invite les lecteurs à réfléchir sur les injustices sociales, mais aussi les comportements humains en général, à travers leurs vices et leurs lacunes.

L’enjeu de la pièce est par ailleurs de faire émerger la vérité, à partir d’une situation initiale dans laquelle tout est dissimulé.

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Les personnages dans Les Fausses confidences

Dans Les Fausses confidences de Marivaux, tu retrouveras différents personnages que nous avons pris le soin de lister pour toi ci-dessous :

  • Dorante : le personnage principal de la pièce, Dorante est un jeune homme séduisant et intelligent. Il est amoureux d’Araminte et décide de se faire engager comme son intendant pour se rapprocher d’elle. Dorante est un maître des intrigues et des faux-semblants.
  • Araminte : une jeune veuve riche et intelligente, Araminte est la cible des fausses confidences de Dorante. Elle est à la fois prudente et curieuse, et se laisse intriguer par les manœuvres de Dorante. Araminte est également courtisée par d’autres personnages, ce qui crée des complications dans la pièce.
  • Monsieur Rémy : le fidèle serviteur d’Araminte, Monsieur Rémy est un homme sérieux et dévoué. Il est chargé de gérer les affaires d’Araminte et se méfie des intentions de Dorante. Monsieur Rémy est souvent le témoin des manipulations de Dorante, mais il ne révèle pas toujours tout ce qu’il sait.
  • Marton : une jeune servante chez Araminte, Marton est une femme vive et intelligente. Elle est amoureuse de Dorante et est également la confidente d’Araminte. Marton joue un rôle important dans l’intrigue en transmettant des lettres et en contribuant aux stratagèmes de Dorante.
  • Dubois : l’ancien valet de Dorante, Dubois est rusé et malin. Il est engagé par Dorante pour l’aider à exécuter ses fausses confidences. Dubois est un maître de la manipulation et de la tromperie, et il joue un rôle clé dans le développement de l’intrigue.
  • Dorimène : une amie proche d’Araminte, Dorimène est une femme coquette et séduisante. Elle est également courtisée par Dorante, ce qui ajoute une dimension supplémentaire aux fausses confidences et aux rivalités amoureuses.
  • Monsieur Bagoût : un homme âgé et riche, Monsieur Bagoût est un prétendant d’Araminte. Il est souvent comique dans ses tentatives d’impressionner Araminte et d’évincer les autres prétendants.
  • Comtesse : une dame de la haute société, la Comtesse est une amie d’Araminte. Elle est souvent présente lors des événements clés de la pièce et apporte une certaine sagesse et une perspective extérieure.

Résumé des Fausses confidences de Marivaux

Divisée en trois actes, cette pièce est écrite en prose et explore les thèmes du mensonge, de l’amour et de la manipulation. L’intrigue tourne autour de Dorante, un jeune homme qui cherche à conquérir le cœur d’Araminte, une veuve riche et séduisante. Dorante a un plan astucieux : il se fait engager comme intendant chez Araminte pour se rapprocher d’elle. Avec l’aide de son valet Dubois, il met en place une série de fausses confidences et de stratagèmes pour attirer l’attention d’Araminte. Il écrit des lettres anonymes, utilise des intrigues et des mensonges pour semer la confusion et faire en sorte que les sentiments d’Araminte se dirigent vers lui.

Au fur et à mesure que l’intrigue se développe, d’autres personnages entrent en scène et compliquent encore plus la situation. Marton, une servante amoureuse de Dorante, devient sa confidente et participe à ses manigances. Dorimène, une amie d’Araminte, devient également une rivale amoureuse pour Dorante.

La pièce met en lumière les jeux de séduction et les enchevêtrements de l’amour et du mensonge. Les personnages s’engagent dans des dialogues habiles et des échanges de lettres pleins de sous-entendus. Les sentiments et les intentions des personnages sont constamment remis en question, créant une atmosphère de mystère et de suspense comique.

Finalement, les fausses confidences de Dorante sont révélées, et les personnages doivent faire face aux conséquences de leurs actions. La pièce se termine par des réconciliations, des mariages et une certaine leçon morale sur la sincérité et l’authenticité des relations amoureuses.

Marivaux, à la différence de Molière, n’étudie pas l’homme en lui-même, mais l’amour avec ses nuances. Les personnages recourent souvent à des artifices, tels que le déguisement, afin de mieux contrôler les sentiments de leurs partenaires.

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Différents stratagèmes mis en œuvre dans la pièce

Confidences et stratagèmes : deux notions en étroite relation

Il semble intéressant tout d’abord d’étudier le terme de « stratagème ». Celui-ci est issu du grec στρατη ́γημα (strategema) qui signifie « la ruse de guerre ». Par suite, le stratège désigne toute personne se distinguant par son aptitude et son habileté à concevoir des plans qui vont lui permettre de maîtriser une situation, et d’en tirer profit. Dans cette perspective, le stratagème devient une ruse permettant à une personne de parvenir à ses fins. Le stratagème est un motif récurrent du théâtre comique. Il est l’un des rouages essentiels de la mécanique de la comédie et assure incontestablement à l’intrigue une progression dramatique.

Par ailleurs, une confidence, dans son acception (sa définition) première, est un secret que l’on communique verbalement à une autre personne. Le titre Les Fausses Confidences souligne dès l’entrée de jeu la place prépondérante qu’occupe le langage dans la pièce, que nous développons plus loin. De plus, la confidence suppose également une relation de confiance entre le locuteur et son destinataire.

Ce rapport fiduciaire (se dit de valeurs fictives, fondées sur la confiance à celui qui les émet) est par ailleurs indispensable à tout acte de communication. Il s’agit de la nécessité de croire en la parole de l’autre qui donne à celle-ci tout son pouvoir. Ainsi, le mécanisme de la « fausse confidence » ne peut arriver à ses fins sans l’entière confiance de la victime envers le manipulateur.

Mensonges, dissimulation et cachoteries dans Les Fausses confidences de Marivaux

Ce qui est paradoxal ici est que le stratagème, qui repose initialement sur une forme de tromperie, permet l’émergence de la vérité des sentiments. Dubois se comporte tel un metteur en scène : il orchestre les interactions entre les différents protagonistes de l’histoire. Il incarne en effet le valet d’intrigue, un personnage classique de la Comedia dell’arte (genre théâtral d’origine italienne né au XVIe siècle, reposant sur l’improvisation d’acteurs souvent masqués. Ingéniosité, naïveté, ruses et travestissements en sont les principaux éléments), qui utilise sa ruse et son intelligence pour servir la passion de son maître.

L’action est orchestrée du début à la fin par Dubois, l’ancien valet de Dorante, fin calculateur qui rivalise d’ingéniosité. Celui-ci fomente, organise et enfin déploie tout le long de la pièce des stratagèmes afin de mener à bien ses projets.

Presque tous les personnages ont recours au moins une fois à la fausse confidence. Araminte feint de vouloir épouser le comte pour tromper Dorante, Marton trompe sa maîtresse en lui conseillant d’épouser le comte, et enfin Dorante dupe Marton en lui laissant croire qu’il l’aime.

Le rôle des apartés dans Les Fausses confidences

Ironie, double énonciation, quiproquos (acte 2, scène 9) avec la confusion de Marton à propos du tableau adressé à Dorante et apartés (acte 1, scène 15 par exemple) : voici quelques-uns des ingrédients les plus notable constituant la recette mettant en œuvre les stratagèmes de la pièce. L’écriture de Marivaux tournée sans cesse vers le lecteur/spectateur, permet d’inclure ce dernier et rendre l’histoire vivante, dynamique et fait de ce dernier un acteur à part entière de la pièce. En effet, on s’adresse directement à lui, et celui-ci devient complice des manipulateurs : le lecteur/spectateur est dans la confidence.

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Le langage au cœur de la mise en place des stratagèmes dans Les Fausses confidences de Marivaux

Une illustration de l’extrême puissance du langage en tant qu’instrument de manipulation et de stratagème

En fin connaisseur de la puissance du langage, Dubois prend plaisir à distiller de manière ingénieuse ses paroles à l’oreille d’Araminte dans le but d’éveiller en elle un intérêt empreint de tendresse pour Dorante. Relatant les circonstances dans lesquelles Dorante se serait épris d’elle, il recourt notamment au topos (tous les thèmes, situations, circonstances ou ressorts récurrents de la littérature) de la rencontre à l’Opéra, où s’efforce de rendre son récit vraisemblable. Il insiste par exemple sur un jour de la semaine ! « C’était un vendredi, je m’en ressouviens ; oui un vendredi » (Acte I, scène 14).

Silences et instrumentalisation des mots

Cependant, il parvient habilement à passer sous silence la date exacte de cette rencontre. Cela lui permet de rendre cet événement vraisemblable et romanesque pour Araminte, qui n’y voit que du feu. Ainsi, ce récit dont la véracité est invérifiable ne peut que flatter Araminte qui s’y laisse prendre. De la même manière, Dubois use de tous les artifices possibles pour exalter ses sentiments, comme la jalousie, en lui inventant une rivale (toujours lors de la scène 14 de l’acte premier). Il utilise également la connivence (Entente secrète ; accord tacite) en lui faisant croire qu’elle détient le secret de la passion de Dorante contre sa volonté (I, 14).

De la même manière, Dubois évalue tellement bien le poids de sa parole qu’il n’hésite pas à en mettre en avant la valeur. On peut dès lors noter l’exemple de la scène 10 de l’acte II dans laquelle on le prie pour dire « un mot ». Araminte, qui est au fil de la pièce de plus en plus consciente du pouvoir que les paroles de Dubois ont sur elle, tente de s’en protéger en les anticipant. Elle lui dit ainsi : « tais-toi donc, tais-toi » à l’acte II de la scène 12, avant de répéter plus loin cette supplique (II, 16 et III, 9).

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Apprentissage et appropriation de la manipulation verbale par les protagonistes

En dépit de son démenti, Araminte a déjà consommé tout le poison de ses discours et a fini par s’éprendre de Dorante. Cependant, en tant que fine observatrice, elle a appris en observant son valet, maniant les mots à son avantage, à tel point qu’elle va elle-même « tendre un piège » (II, 12) à Dorante. Ceci va se produire au moment où elle va dicter une fausse déclaration au Comte afin de le forcer à lui avouer son amour. Toutefois, Dorante, malgré le fait qu’il soit au silence sur sa passion, du moins seulement en apparence, se révèle lui-même très adroit avec les mots.

La conclusion des Fausses confidences

Pour conclure, cette pièce met en œuvre divers procédés et stratagèmes, qui rendent le véritable sens de cette dernière difficile à saisir. En réalité, le masque n’est jamais totalement levé sur le réel et toutes les pistes de lecture restent ouvertes. C’est avec subtilité que Marivaux parvient, avec sa pièce des Fausses Confidences, à laisser planer un flou sur la vérité fondamentale et le sens même des vérités qu’il veut exposer, prises dans la superficialité d’une réalité empreint de futilité ou d’artifices. Une chose est sûre, tout comme dans l’île aux esclaves, Marivaux use et ruse de l’art du déguisement, du travestissement pour arriver à ses fins.

En ce sens, on peut affirmer que le caractère fuyant, sans cesse en mouvement, de la pièce tient à son ambiguïté fondamentale entre l’être et le paraître, car peut-être est-ce l’essence même du marivaudage : un art du trompe-l’œil, où, dans un jeu infini de reflets entre le vrai et le faux, la réalité n’est plus discernable du mensonge.

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