La Princesse de Clèves, Madame de La Fayette

La Princesse de Clèves, Madame de La Fayette : résumé et analyse de l’œuvre

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La Princesse de Clèves de Madame de La Fayette est une œuvre emblématique de la préciosité, mouvement littéraire du XVIIe siècle. Au programme du baccalauréat de français cette année, nous te proposons de revenir sur les éléments les plus importants de l’ouvrage. Dans ce nouvel article, tu retrouveras un résumé et une analyse de cette œuvre phare, afin de briller le jour de l’épreuve. N’hésite pas à prendre quelques notes.

La Princesse de Clèves, Madame de La Fayette

Contexte historique

Lors d’une analyse d’œuvre ou d’un extrait d’œuvre pour le baccalauréat de français, il est très important (d’essayer tout du moins) de situer l’œuvre dans son contexte.

Le roman de Mme de La Fayette se déroulant au cœur de la cour des Valois de fin 1558 à fin 1559, il est plus que nécessaire d’avoir de solides repères historiques pour saisir les enjeux narratifs de l’œuvre. Cette année 1559 n’est pas choisie au hasard. D’abord, trois mariages princiers ont lieu : Claude de France et le Duc de Lorraine (au cours duquel vont se rencontrer les héros du roman), Mme Elizabeth et le roi d’Espagne ainsi que Marguerite de Valois et le Duc de Savoie. Ces événements fournissent à la narration des éléments à la fois riches (en description et en péripéties) et vraisemblables. De plus, c’est l’année de la mort de Henri II, blessé mortellement lors d’un tournoi. Placer l’action à la fin d’un règne revêt nécessairement une symbolique forte puisqu’avec la mort du Roi, c’est l’ère d’une vie de cour et de son idéal qui disparaissent.

Il est important de noter que si le Duc de Nemours est un personnage historique, Mme et Mlle de Chartres n’ont en revanche jamais existé. L’entremêlement du fictionnel et de l’historique participe à la richesse de ce roman novateur.

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Vie de l’auteur

Mme de La Fayette est née en 1634 à Paris et morte en 1693. Elle fréquente rapidement les salons de l’hôtel de Rambouillet ainsi que de Madeleine de Scudéry. Fidèle amie de La Rochefoucauld et de Mme de Sévigné, elle épouse le comte de La Fayette, dont La Bruyère dira qu’il a été tellement éclipsé par sa femme, qu’on ne sait plus s’il est mort ou en vie. Avant d’écrire anonymement La Princesse de Clèves, Mme de La Fayette avait publié La Princesse de Montpensier, une nouvelle sobre au réalisme acerbe et au pessimisme sombre, ainsi que Zayde, un roman héroïque. C’est en étant nourrie de ces deux genres littéraires, que Mme de la Fayette publie en 1678 La Princesse de Clèves. Cette œuvre apparaît donc comme une synthèse inédite de la nouvelle et du roman traditionnel.

Le contexte d’écriture est marqué par la prédominance littéraire de la préciosité. C’est une tendance littéraire que représente Mme de Scudéry et qui est née au XVIe siècle dans le salon de l’hôtel de Rambouillet. Un roman emblématique du courant précieux est L’Astrée d’Honoré d’Urfé. Ce courant fait de l’amour le thème principal -si ce n’est l’unique- du roman et la façon de traiter le sujet est toujours identique : le courant précieux, en s’inspirant des discussions de salon, se propose de répondre à une question de bonne conduite que peut se poser un amant.

La préciosité s’accompagne également d’un idéal : la beauté, l’intelligence, la richesse et la finesse d’esprit des amants sont au cœur de l’idéal précieux d’un amour qui est conçu comme pur et surhumain. En revanche, il est souvent malheureux.

Réception de l’œuvre

Quoique publié anonymement, La Princesse de Clèves est immédiatement un immense succès et fait couler beaucoup d’encre chez les critiques de l’époque. Même si l’identité de l’auteur intéresse presque tout autant que la qualité narrative, les critiques ne manquent pas de s’accorder sur l’invraisemblance du roman. La tentation de Mme de Chartres de partager à son mari ses pulsions d’adultère est considérée comme une marque de folie. Ces critiques n’ont pourtant pas détourné les lecteurs qui y virent malgré tout un chef d’œuvre.

La Princesse de Clèves : un roman novateur ?

La question du genre de l’œuvre est un axe de lecture qui permet de rendre compte de la complexité et de l’originalité du roman.

La question se pose d’abord de savoir s’il s’agit d’un roman ou d’une nouvelle. Comme nous l’avons vu, Mme de La Fayette s’est essayée aux deux exercices avant d’écrire La Princesse de Clèves. D’un côté, l’œuvre tient de la nouvelle : l’intrigue est concentrée, elle tourne autour de quelques personnages principaux, le cadre spatio-temporel est relativement ramassé. Le ton et la fin pessimistes rappellent également les conclusions souvent sombres des nouvelles. Enfin, le refus du mariage entre Mme de Clèves et le Duc de Nemours, alors même que tous les obstacles sont levés, est incompatible avec la forme traditionnelle du roman héroïque qui ne peut pas ne pas avoir un dénouement.

Une narration complexe

Mais l’œuvre ne se résume pas à la simple nouvelle. Les personnages évoluent dans un cadre décrit longuement, une cour présente et vivante ; la narration est complexe puisqu’elle est interrompue quatre fois par l’insertion d’épisodes autonomes (récit sur le personnage de Diane de Poitiers, récit de l’histoire de Mme de Tournon, l’histoire de la cour d’Angleterre et l’histoire du vidame de Chartres) qui viennent insuffler au tempo de l’œuvre une pause narrative pour laquelle il n’y aurait pas de place dans une nouvelle. Le dernier élément proprement romanesque, et non des moindres, est la subtilité narrative qui repose sur des jeux de symétrie, de parallèles et d’échos. Par exemple, le vol du portrait de Mme de Clèves par le Duc de Nemours trouve un écho chiasmatique dans la scène où Mme de Clèves contemple secrètement le portrait du Duc de Nemours. Cette scène est elle-même construite sur une succession de regards qui en fait sa richesse et son intensité : l’homme de main du Prince de Clèves observe le Duc de Nemours qui regarde la Princesse qui contemple à son tour le portrait. Par là, l’auteur nous fait éprouver l’étrange paradoxe que l’intensité de l’amour n’est due qu’à la distance qui l’empêche de se réaliser. De telles subtilités de narration et de force de suggestion sont réservées à la forme romanesque. En ce sens, La Princesse de Clèves les inaugure et les rompt, par la prégnance de la vie intérieure, son analyse et sa restitution littéraire, avec le roman héroïque tel que pouvait le concevoir Honoré d’Urfée au siècle précédent. À noter que le genre de la mémoire peut aussi être convoqué pour questionner l’originalité littéraire de l’œuvre.

La princesse de Clèves représente donc une évolution littéraire majeure en ce que l’œuvre rassemble des propriétés du roman et de la nouvelle. Il en résulte une œuvre novatrice en matière d’analyse des sentiments humains.

Le rôle du cadre historique dans La Princesse de Clèves

L’entremêlement des genres littéraires soulève une autre question littéraire importante : le rôle du cadre historique et réel dans l’espace fictionnel. Dans son célèbre ouvrage de critique Forme et Signification dont un chapitre est dédié à La Princesse de Clèves, Jean Rousset explique que la nouvelle appartient davantage à l’Histoire, puisqu’elle fait vivre un détail ou une anecdote historique que l’historien ne retient pas. Il s’agit d’une invention qui s’élabore à partir de la réalité et qui ne dépasse pas le cadre historique. En revanche le roman est une invention totale, il représente les choses comme notre imagination se les représente.

L’œuvre de Mme de La Fayette met encore une fois à mal cette distinction car l’originalité du roman naît de ce va et vient narratif entre la pure fiction et la représentation du cadre historique. L’Histoire joue un double rôle : elle est à la fois un support au service de la narration (le premier mariage est par exemple l’occasion pour les deux personnages principaux de se rencontrer) mais également un objet esthétique à part entière (les descriptions de la cour des Valois valent en elles-mêmes et indépendamment de leur fonction narrative). Le cadre spatio-temporel historique permet à Mme de La Fayette de respecter certaines normes du roman héroïque comme l’unité de lieu (la cour des Valois) et l’unité de temps (une année). Le décor historique permet également de servir le dessein de vraisemblance que s’est proposé l’auteur et le modèle de vie que représentent les Valois pour les contemporains de Mme de La Fayette, cela confère aux personnages (et donc à l’œuvre) un aspect de magnificence et de grandeur. L’histoire sert donc le récit, constitue une aide et un support à la narration, et permet de conférer à l’œuvre une certaine dignité dans la hiérarchie des genres littéraires (puisque ses personnages sont issus d’un milieu magnifique, le genre de l’œuvre est nécessairement supérieur à d’autres).

Cependant, il faut nuancer le propos car les récits et descriptions historiques ont une valeur littéraire qui ne dépend pas totalement de la fiction qui se construit dessus. À ce titre, la première apparition du Duc de Nemours a davantage de qualités littéraires qu’historiques. Cette succession de portraits historiques que vient clore le portrait du Duc de Nemours est restée comme l’un des passages les plus célèbres de l’œuvre, non pas parce qu’elle permet de renforcer la vraisemblance ou de poser le décor, mais bien parce qu’elle introduit une gradation dans la magnificence des Princes qui correspond à la gradation amoureuse intime qu’éprouve Mlle de Chartres tout au long du roman, et au terme de laquelle se trouve M. de Nemours. Tout comme son portrait le laisse deviner, il est à la fois le plus magnifique de tous et celui qui restera inaccessible. Cette description historique a donc aussi une valeur littéraire intrinsèque. L’Histoire sert donc la fiction mais contrairement aux romans épiques où elle est cantonnée à la toile de fond, ici l’Histoire est une dimension de l’œuvre à part entière.

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Comment trouver une problématique à La Princesse de Clèves ?

La question du genre de l’œuvre et du rôle de l’Histoire constitue déjà une approche intéressante de l’œuvre. Il est important de connaître les différents genres littéraires pour le bac de français. Cependant, la richesse de La Princesse de Clèves soulève d’autres problématiques.

La tension constante entre le pouvoir de l’illusion et l’effort d’élucidation et d’analyse de la Princesse. Le personnage de la Princesse est en quête constante de la vérité et de la lucidité : les analyses sentimentales, les regards rétrospectifs, etc. sont les moyens de cette entreprise euristique. Mais d’un autre côté, la cour consacre la puissance du paraître et de l’illusion. La Princesse est donc le symbole de l’élucidation qui évolue dans le monde du paraître. Cette tension est prégnante car l’œuvre nous fait à la fois faire cet effort avec la Princesse et consacre en même temps l’illusion comme la seule chose qui nous permette de vivre (e.g : le Prince de Clèves mourra d’avoir été tiré de « l’aveuglement tranquille » dans lequel il aurait pu vivre toute sa vie).

L’œuvre s’attache également à un double mouvement : la déconstruction du monde héroïque traditionnel et la promotion de l’idéal aristocratique. L’auteur montre par toutes les descriptions à quel point la magnificence de la cour cherche à masquer la laideur de l’homme. Derrière cette entreprise, il y a à la fois l’idéal aristocratique selon lequel l’esthétique fait accepter la réalité et en même temps la faiblesse morale de l’Homme, ce qui est aux antipodes du héros classique.

Tu peux faire des liens entre cette œuvre et d’autres œuvres au programme du baccalauréat de français.

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