La naissance de la poésie romantique

À lire dans cet article :

Après avoir vu la poésie au Moyen-Age, la Pléiade et l’histoire de la poésie aux XVI ème et XVII ème siècle, nous allons nous concentrer dans cet article sur la naissance de la poésie romantique.

Quelques théories poétiques au début du XIXème siècle

Plusieurs théoriciens dans l’Europe entière ont tenté de théoriser le rôle du poète dans la société. Voici deux exemples de théories.

Globalement l’idée reste la même : le poète ne doit pas se contenter de décrire la Nature ou sa propre subjectivité. Il doit aller plus loin, et tenter par la richesse de son vocabulaire et de son style de décrire ce que le commun des mortels ne ressent pas.

  • Joseph Joubert, Pensées, 1774 – 1824 : le langage poétique, tout en étant harmonieux et clair, doit permettre au poète de dépasser l’immédiat et de transmettre par les mots toute l’harmonie de la Nature. 

” Or, que fait le poëte ? à l’aide de certains rayons, il purge et vide les formes de matière, et nous fait voir l’univers tel qu’il est dans la pensée de Dieu même. Il ne prend de toutes choses que ce qui leur vient du ciel. Sa peinture n’est pas la copie d’une copie, mais un plâtre de l’archétype, plâtre creux, si je puis dire, qu’on porte aisément avec soi, qui entre aisément dans la mémoire, et se place au fond de l’âme, pour en faire les délices dans les instants de son loisir. Les accents inarticulés des passions ne sont pas plus naturels à l’homme que la poésie.

Le talent poétique naît dans les âmes vives de l’impuissance de raisonner. La poésie n’est utile qu’aux plaisirs de notre âme. La nature bien ordonnée, contemplée par l’homme bien ordonné, est la base, le fondement, l’essence du beau poétique.

C’est surtout dans la spiritualité des idées que consiste la poésie.

Rien de ce qui ne transporte pas n’est poésie.

La lyre est, en quelque manière, un instrument ailé.

Il faut que le poëte soit, non-seulement le Phidias et le Dédale de ses vers, mais aussi le Prométhée, et qu’avec la figure et le mouvement, il leur donne l’âme et la vie. 

  • Mme de Staël (1766 – 1817), De l’Allemagne, 1810

” Le poète sait rétablir l’unité du monde physique avec le monde moral : son imagination forme un lien entre l’un et l’autre. 

Les maîtres de la poésie romantique

C’est aux environs des années 1820 que se produit la première révolution poétique du XIX ème siècle.

Les romantiques, avec la publication des Méditations poétiques de Lamartine réinventent une poésie authentique et libérée centrée autour du Moi, sujet et objet du poème, narrateur et destinataire du recueil, un écho d’impressions du monde extérieur.

Le principe central de cette poésie est l’unité mystérieuse entre le Moi et le monde.  La poésie s’ouvre ainsi également aux rêves et aux angoisses mais aussi à l’inspiration militante, révoltée et révolutionnaire. 

” Je n’imitais plus personne, je m’exprimais moi-même pour moi-même. Ce n’était pas un art, c’était un soulagement de mon propre cœur qui se berçait de ses propres sanglots. “, Lamartine, Méditations poétiques, 1820.

” Ce qu’il faut à l’artiste et au poète, c’est l’émotion. Quand j’éprouve, en faisant un vers, un certain battement de cœur que je connais, je suis sûr que mon vers est de la meilleure qualité que je puisse pondre… “, Musset, 1831.

” La poésie sera intime surtout, l’écho profond, réel, sincère des plus mystérieuses impressions de l’âme. Ce sera l’homme lui-même et non plus son image, l’homme sincère et tout entier. “, Lamartine, Méditations poétiques

Le poète doit ” savoir considérer l’univers entier comme un symbole des émotions de l’âme “, Germaine de Staël.

L’évolution de la stylistique et de la métrique : le poème romantique

Une citation en guide de préambule

Être romantique, ce fut d’abord pour eux croire en la poésie – décider de l’arracher à la stagnation et au mépris d’elle-même. En lui donnant, sans doute, une forme nouvelle : mais on se trompe si l’on croit que c’est là l’essentiel, du moins si l’on entend par forme une technique. (…)

C’est le romantisme qui a donné à la métaphore le sens profond que la poésie ne cessera ensuite d’interroger. C’est lui qui, par le ” procédé de couleur ” fera de la vertu de sensation la vertu majeure du poète. C’est lui qui a situé la parole poétique en un lieu qu’elle ne quittera plus : l’irrationnel.

C’est l’intrusion de la subjectivité, dont il a fallu ensuite que la poésie se délivre, qui a révélé le choc, la percussion, l’identification violente qui transportée dans un autre ordre, demeureront son style. Mais, pour exprimer une expérience neuve, il est vrai que les romantiques ont utilisé une expression traditionnelle en dépit de quelques aménagements prosodiques et un langage de clarté et de continuité, bien qu’il se fonde sur l’irrationnel. (…) Par son expression prosodique et par son utilisation générale du langage, le romantisme est tourné vers le passé. Mais son expérience existentielle est celle de la poésie moderne toute entière.

Gaëtan Picon, Histoire des littératures, tome III

Remarques générales de style

L’innovation métrique de la poésie romantique est limitée – les poèmes sont écrits en mètres pairs (octosyllabe, décasyllabe, alexandrin). Cependant, l’utilisation de l’alexandrin devient plus souple. Les romantiques veulent ” disloquer ce grand niais d’alexandrin ” (Hugo). Même si l’alexandrin classique (deux hémistiches séparés par une césure) demeure le plus utilisé, de nombreux poètes recourent à l’alexandrin ternaire, appelé aussi alexandrin romantique, qui compte 3 accents d’intensité et deux coupes au lieu d’une césure.

 Vêtu de blanc/ ainsi qu’un mort / de son linceul ” (Vigny)

            Les genres utilisés demeurent globalement les mêmes : sonnets, odes, ballades, épîtres, satires … Mais les poèmes deviennent de plus en plus lyriques.

 ” La poésie lyrique s’exprime au nom de luter même ; ce n’est plus dans un personnage qu’il se transporte, c’est en lui-même qu’il trouve les divers mouvements dont il est animé (…). C’est l’apothéose du sentiment. “.  (Madame de Staël)

            Le style évolue peu, mis à part l’utilisation croissante du rejet et du contre rejet (Baudelaire, Lamartine). Les poètes romantiques sont également friands d’images (comparaisons, métaphores (dont ils augmentent les écarts sémantiques), oxymores.

Nous allons désormais poursuivre avec d’autres mouvements littéraires centraux du XIX ème siècle tels que le symbolisme.

Tu veux plus d’informations et de conseils pour réussir tes examens et trouver ton orientation ? Rejoins-nous sur Instagram et TikTok !

À la une