La représentation, ses langages, moyens plastiques et enjeux artistiques est un chapitre clé au programme de la spécialité Arts au bac 2021 en Arts Plastiques. Nous avons résumé dans cet article tout ce qu’il fallait savoir sur la représentation.
La question de la représentation traverse toute l’histoire de l’art. Dès les premiers traits sur les parois des grottes paléolithiques l’homme se représente lui-même et ce qui l’entoure. Il s’essaie au dessin et à la peinture avec ce qu’il a sous la main, pour laisser des traces de son passage ou faire vivre ses symboles, et petit à petit se perfectionne. Avec le temps, les supports se multiplient ; parchemin, papier, papyrus, toile, etc.
Représentation – définition
La représentation se définit comme la présentation de l’absence, on présente à nouveau un objet qui n’est plus. Selon Pline l’Ancien (23-79), nous devons remercier une jeune fille de la cité de Corinthe pour la première représentation picturale comme le montre avec délicatesse Jean-Baptiste Regnault (1754-1829) dans son Origine de la peinture (1786). Alors que son amant est endormi, la veille de son départ pour l’étranger, elle capture le contour de son ombre sur la pierre pour ainsi conserver celui qu’elle n’aura plus à ses côtés. La conception de la représentation est ainsi étroitement liée à celle de la figuration dans une recherche de mimétisme (copie) du réel absolu, appelée mimesis. Les différents mouvements artistiques et les artistes qui les animent vont se donner un malin plaisir à la questionner, et lui en faire voir de toutes les couleurs, surfaces et matériaux.
Représentation – L’approche scientifique du réel
La représentation réaliste
Peintre virtuose de la renaissance Allemande, Albrecht Dürer (1471-1528) est connu pour la finesse et la précision de ses oeuvres, en particulier pour ses gravures. Dans le Lièvre, il atteint une précision hyperréaliste qui montre la justesse de son observation et son souci du détail notamment avec la représentation du moindre poil.
La perspective et la représentation
Depuis la fin de Moyen-Âge, les artistes rivalisent de savoir faire pour dépeindre le monde qui les entoure. La théorisation de la perspective par Alberti (1406-1472) dans son Della Pictura (1435) sera reprise par les italiens tels que Pierro Della Francesca notamment dans sa Flagellation du Christ (1444-1478). Elle témoigne de la recherche d’une représentation de plus en plus fidèle à la réalité qui s’éloigne de la perspective hiérarchique de l’époque médiévale où les éléments sont représentés plus ou moins grands en fonction de leur importance. La quête de perfection de Dürer se retrouve également dans ses écrits avec en particulier son traité Quatre livres sur la proportion humaine. La représentation est donc chez lui associée à une recherche d’une perfection de la technique.
Représentation – Quand la peinture devient oeuvre d’art
Du dessin à l’oeuvre d’art
Avec l’invention de la photographie en 1839, le dessin et la peinture ne peuvent plus rivaliser dans la recherche de la mimesis. Les prémices de l’impressionnisme se faisaient déjà sentir chez l’anglais Turner, mais les vénitiens de la Renaissance tels que Tintoret, Titien et Veronèse, qui prônaient un usage plus libéré de la couleur, et à leur suite Delacroix en quête d’un “indéfinissable”, en avaient déjà posé les premières pierres. Henri de Toulouse Lautrec (1864-1901) n’a que trop compris cet enjeu et s’en saisit à pleine main. Ses croquis des femmes de cabaret, pris sur le vif, ne se cantonnent plus au statut de prise de note, mais sont désormais considérées comme de vraies oeuvres d’art. Les premières affiches réalisées grâce à la technique de la lithographie, permettent une large diffusion des oeuvres de Toulouse Lautrec.
Nouveaux sujets et techniques de représentation
Elles participent également d’un élargissement du champ de ce qui est représenté dans l’art. Les sujets triviaux tels que les maisons closes, les bars, les rues sont de plus en plus courant. Les scènes de genre, représentant la vie quotidienne, qui se faufilaient dans les salons du XVIII° siècle ont désormais la gloire qu’elles attendaient face au tableaux d’histoire qui avaient la primauté. C’est désormais la représentation du quotidien dans sa plus grande frugalité qui attire les artistes. Les techniques employées sont à l’image de leur sujet, simples: fusain, pastel, etc. Il faut aller au plus vite pour saisir l’intensité et la fugacité de la vie.
Représentation – Quand le corps se fait pinceau
Une représentation originale
Puisque désormais faire oeuvre ne tient plus à une représentation du réel, dans les années 1960, Yves Klein fait appel à des femmes pour qu’elles s’enduisent de son fameux bleu, dénommé IKB (déposé en 1960). Elles viennent ensuite se coller sur une grande toile posée au sol, ou sur un mur, pour y laisser l’empreinte de leur corps, et donner naissance aux Anthropométries. Les traces laissées par les corps ne sont que la continuité d’une réflexion que l’artiste a entamé dès ses débuts sur la figuration.
Explorer de nouvelles frontières de la représentation
A ce moment là, l’art abstrait a déjà trouvé sa place dans le paysage artistique suite aux oeuvres des russes Kandinsky et Malevitch ainsi que du néerlandais Mondrian. Yves Klein s’essaie lui aussi aux monochromes de couleur pure qui, comme il l’affirme, représentent déjà “quelque chose”. Sa “technique des pinceaux vivants” – qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler les mains pariétales des premiers hommes – vient bousculer un peu plus les frontières de la représentation. Représenter ne tient pas seulement à la figuration, mais également aux émotions et aux idées. Parfois filmées, ses Anthropométries font partie des premiers pas du happening ou art de la performance, où le corps devient support de la représentation. Elles s’immiscent aussi dans la branche de l’art conceptuel des années 1960 où l’idée fait oeuvre. Il s’agit pour lui de mettre de la distance entre l’oeuvre et l’artiste. Avec Yves Klein, la représentation n’est plus seulement l’histoire d’un artiste face à sa toile, mais d’une véritable réflexion sur l’oeuvre d’art et la figure de l’artiste. A tel point qu’il finira par faire une exposition du “Vide” à la galerie Iris Clert en 1958.
Ainsi, dès ses premiers traits, l’homme s’attache à représenter et se représenter. Sa quête est sans cesse bousculée par des techniques et des idées. La représentation principalement liée à l’idée de figuration se voit ébranlée au XIX° siècle par l’apparition de la photographie. Celle-ci permet de laisser la place à une plus grande expressivité libérant les techniques artistiques, les matériaux et les artistes. Dans les années 70, le désir de réappropriation de son corps par l’artiste et notamment du corps féminin avec des personnalités telles que Marina Abramovic et Gina Pane annonce le passage de la représentation à la présentation. Le corps n’est plus représenté mais est lui même le support de l’oeuvre. Aujourd’hui, rien de mieux pour appréhender cette problématique que de considérer les oeuvres de Jean-Luc Verna qui se couvre de tatouages, ou encore d’Ornan qui vient de se faire implanter des cornes sous cutanées au niveau du front pour comprendre comment les artistes façonnent, représentent et présentent leur corps.
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