Parmi les types de textes les plus importants en littérature (et en philosophie !) figurent en bonne place les contes. S’il est aisé de les réduire aux histoires lues aux enfants pour les endormir, il ne faut pas ignorer leur portée qui ne se limite pas à cette première approche. Dans cet article, nous te présentons donc en détail les enjeux des contes, leurs caractéristiques et leur importance, encore primordiale dans nos sociétés actuelles.
Qu’est-ce qu’un conte ?
Un conte est un récit qui est la plupart du temps relativement court. Il est écrit en prose ou en vers et raconte des évènements extraordinaires, c’est-à-dire qu’ils sortent de la réalité par l’introduction d’éléments merveilleux. Le conte a également pour caractéristique de se transmettre à la fois à l’écrit et à l’oral.
Les origines du conte
Le conte littéraire dérive de manière directe du conte populaire, qui appartient à la littérature orale et reste le plus souvent anonyme, tandis que le conte littéraire est le fruit d’une création littéraire de toutes pièces et peut donc être facilement rattaché à un auteur, à une époque ou encore à un mouvement.
Les caractéristiques du conte
Le conte traditionnel transporte les lecteurs dans un espace et à une époque qui ne sont pas précisément ancrés. Cela confère à ce récit un caractère atemporel, c’est-à-dire en dehors du temps. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les contes débutent fréquemment par la formule « Il était une fois ».
De plus, il convient de noter qu’un conte peut contenir une morale. Lorsque c’est le cas, le conte devient un texte moraliste.
Par ailleurs, la situation finale est la plupart du temps manichéenne (soit bonne, soit mauvaise, et ce, sans entre-deux) : les méchants sont punis et les gentils sont récompensés.
En outre, le récit est assez simple, il suit le schéma narratif dans l’ordre suivant :
- La situation initiale ;
- L’élément perturbateur ;
- Les péripéties ;
- L’élément de résolution ;
- La situation finale.
Les personnages dans un conte
Le conte contient également un schéma actantiel, qui structure et détermine les fonctions des différents personnages. En effet, dans les contes, les personnages symbolisent chacun au moins un aspect de l’être humain, ce qui implique que les lecteurs, à travers les aventures des personnages, font face à des dangers et à leurs peurs les plus intimes et profondes.
Les différents types de contes
Si ce genre est sinon le genre le plus ancien, du moins l’un des genres les plus anciens, il s’est développé sous des formes multiples. On retrouve tout d’abord le conte de fées, ou merveilleux, qui dispose d’un double niveau de lecture, car il s’adresse à la fois aux enfants et aux parents. Il existe également le conte philosophique, qui s’est développé au XVIIIe siècle. Ce dernier a pour caractéristique de porter un regard critique, satirique sur la société contemporaine. Et enfin, le conte fantastique, le plus récent des trois, qui crée un sentiment d’inquiétude et joue avec l‘étrangeté.
Les formes de contes à travers les siècles
- Le XVIIe siècle
L’un des auteurs de contes les plus connus, quelle que soit l’époque considérée, est sans doute Charles Perrault. Cet auteur moraliste est le chef des Modernes au cours de la fameuse querelle qui les oppose aux Anciens. À travers ses Contes, tels que « La Belle au bois dormant », « Le Chat botté », ou encore « Cendrillon », il délivre un enseignement à ses lecteurs selon le précepte classique de placere et docere. Ce principe consiste à instruire à travers une forme plaisante, qui est ici le conte.
Dans cette perspective, l’aspect plaisant des contes est renforcé par les nombreuses gravures de Gustave Doré, qui illustrent les textes.
- Le XVIIIe siècle
Après le grand succès de Charles Perrault, vient l’âge d’or du conte philosophique, qui emprunte au conte populaire son cadre intemporel et utopique. Les auteurs s’appuient sur son possible sens allégorique dans le but de transmettre un message politique ou moral. Voltaire, à travers Zadig (1748), Micromégas (1752), ou encore Candide (1759) en est le représentant le plus connu.
- Le XIXe siècle
Au XIXe siècle, en plein dans l’époque romantique, le conte est adopté comme modèle littéraire et considéré comme un genre à part entière, en particulier en Allemagne. Les chefs de file de ce courant populaire sont sans conteste les frères Grimm, qui ressuscitent le merveilleux des contes populaires.
En parallèle, de nombreux écrivains adoptent la forme du conte, et renouent par conséquent avec la tradition orale. On peut citer les auteurs suivants : Charles Dickens avec ses Contes de Noël (1843), Hans Christian Andersen avec Contes (1835) et Nouveaux Contes (1872), mais aussi Alphonse Daudet à travers Contes du lundi (1873), Émile Zola dans Contes à Ninon (1864), Honoré de Balzac (Contes drolatiques, 1855), Alfred de Musset (Contes d’Espagne et d’Italie, 1829) pour les plus connus.
Dès lors, le conte fantastique se développe à cette même époque, en particulier sous la plume de Guy de Maupassant avec « Le Horla », « Sur l’eau », « La morte » ou les contes merveilleux et fantastiques d’Edgar Allan Poe, traduits par Charles Baudelaire (Histoires extraordinaires, 1856). Ces contes jouent avec le lecteur, créant une atmosphère pesante, inquiétante et surtout étrange, inexplicable et qui demeure souvent inexpliquée.
- Le XXe siècle
Au XXe siècle, à l’heure où la majorité des écrivains remettent en question et entendent s’émanciper de la forme narrative, Italo Calvino, quant à lui, explore les contes pour les adapter à son époque, en créant des atmosphères nouvelles, des cadres et histoires uniques. Par exemple, dans Le Baron perché (1957), cet auteur met en scène un jeune garçon qui vit dans un arbre, et refuse la vie du monde extérieur, juché sur des branches et jetant des regards ironiques au reste du monde.
On peut également mentionner Marcel Aymé et ses célèbres Contes du chat perché (1934) ou encore Jacques Prévert, avec Contes pour enfants pas sages (1977).
Finalement, on voit subséquemment fleurir sur le marché de l’édition pour la jeunesse de très nombreux ouvrages illustrés de contes à destination des enfants.
Pour aller plus loin
Si nous t’avons présenté dans cet article la genèse et l’évolution des contes à travers les siècles en Europe, c’est principalement en raison de l’angle d’étude proposé dans les programmes du secondaire. Il reste néanmoins très intéressant de dresser des parallèles avec les contes d’autres cultures. Ces derniers, qu’ils soient africains, asiatiques, etc., présentent de nombreux points communs avec les contes issus de la tradition occidentale que nous connaissons, et permettent, par comparaison, d’introduire une dimension plus profonde à l’étude des contes.
Si tu veux en savoir plus sur la portée et l’intérêt des contes pour nos sociétés, nous te suggérons d’écouter cette émission enregistrée par France inter, intitulée « Il était une fois… les contes ! » (juillet 2023).
La dimension pédagogique des contes est quant à elle étudiée dans cette émission très intéressante également, que nous te conseillons vivement !
Finalement, étudier les contes ne se limite pas à la première lecture enfantine que l’on peut en faire : un conte est un texte profond, qui a deux objectifs, celui de distraire, et celui d’instruire. Il n’est ainsi nullement étonnant de voir le succès toujours très actuel de certains textes, partout dans le monde.