Le Horla est une nouvelle de Maupassant grâce à laquelle il apparaît comme un précurseur du genre fantastique psychologique. En effet, le texte ne permet jamais d’être certain de l’existence de la créature qui hante le narrateur. Nous te proposons dans cet article un résumé suivi d’une analyse de cette œuvre majeure du genre fantastique.
Qui était Guy de Maupassant ?
Naissance et origines de Guy de Maupassant
Guy de Maupassant naît le 5 août 1850 au château de Miromesnil, à Tourville-sur-Arques, près de Dieppe. Il est issu d’une famille aux racines bourgeoises et nobles : son père, agent de change d’origine lorraine, avait été anobli, tandis que sa mère, cultivée et passionnée de littérature, appartenait à la bourgeoisie normande. Cette dernière, amie de jeunesse de Gustave Flaubert, jouera un rôle clé dans la vocation littéraire de Maupassant, puisque Flaubert deviendra son mentor et ami proche.
Enfance et jeunesse de Maupassant (1850-1871)
Après la séparation de ses parents en 1860, Guy grandit auprès de sa mère et de son frère cadet à Étretat. Il fait ses études en Normandie avant de s’inscrire en droit à Paris. Toutefois, la guerre franco-prussienne de 1870 interrompt son parcours universitaire, et il s’engage comme garde mobile.
Carrière de fonctionnaire et débuts littéraires (1871-1880)
De retour de la guerre, il doit travailler pour subvenir à ses besoins et entre au ministère de la Marine en 1872. Parallèlement, il nourrit son ambition d’écrivain et fréquente les cercles littéraires parisiens. Pendant cette période, il mène une vie marquée par les plaisirs mondains et les aventures amoureuses. En 1877, il apprend qu’il est atteint de syphilis, une maladie qui influencera ses écrits et sa santé mentale.
Le succès littéraire (1880-1888)
La publication de Boule de suif en 1880 dans le recueil Les Soirées de Médan marque un tournant dans sa carrière. En l’espace d’une décennie, il devient l’un des auteurs les plus prolifiques et populaires de son époque, écrivant près de 300 nouvelles et six romans, dont Une Vie (1883), Bel-Ami (1885) et Le Horla (1887). En parallèle, il collabore avec plusieurs journaux prestigieux, tels que Le Figaro, Le Gaulois et Gil Blas. Cette reconnaissance lui ouvre les portes de la haute société, notamment du cercle de la princesse Mathilde Bonaparte. Dans la préface de Pierre et Jean (1888), il affirme son indépendance artistique et prône une recherche de la vérité simple et sincère.
Déclin et fin de vie (1888-1893)
Affaibli par la syphilis, Maupassant réduit peu à peu sa production littéraire et multiplie les séjours sur la Côte d’Azur et en Afrique du Nord pour se reposer. La maladie le plonge dans une dépression profonde, et il développe une obsession pour la mort. Après une tentative de suicide, il est interné à la clinique du docteur Blanche à Passy, où il décède le 6 juillet 1893 à l’âge de 42 ans. Sa descente aux enfers fait écho à celle de son frère Hervé, mort en 1889 dans un état de démence.
Résumé du Horla de Guy de Maupassant
L’histoire se déroule en Normandie, près de Rouen, pendant 4 mois, du 8 mai au 10 septembre. Le narrateur mène une existence sereine dans sa maison de campagne, profitant pleinement du calme et des paysages qui l’entourent. Lors d’une promenade dans son jardin, il observe des navires remontant la Seine, et son regard est captivé par un majestueux trois-mâts brésilien aux voiles immaculées.
Peu après, son bien-être bascule. Il est envahi par une mélancolie profonde et ressent une angoisse croissante. Devenu insomniaque, il consulte un médecin, mais celui-ci ne détecte rien d’anormal. Les nuits du narrateur deviennent de véritables cauchemars, hantées par une présence invisible qui l’agresse et le prive de sommeil.
Une présence inexplicable
Au fil des jours, son état empire. Lors d’une promenade en forêt, il est pris d’une sensation oppressante, persuadé d’être suivi par une entité. Espérant trouver du répit, il part en voyage et visite le Mont-Saint-Michel. Bien que cette excursion lui procure un moment de sérénité, une légende racontée par un moine éveille en lui une inquiétude profonde. À son retour à Paris en juillet, ses tourments reprennent avec encore plus de violence : il sent qu’une force surnaturelle puise son énergie.
Le mystère de la carafe
Une nuit, il découvre que sa carafe d’eau est vide, alors qu’il n’a aucun souvenir d’avoir bu. Intrigué, il décide de mener une expérience en laissant une carafe d’eau et une de lait pleines. Le lendemain, l’eau a disparu et le lait a été consommé. Il quitte alors Paris pour quelques jours, espérant que la distance atténuera cette influence. Lors des festivités du 14 juillet, il parvient même à s’amuser, chose inhabituelle pour lui.
Cependant, lors d’une soirée chez sa cousine, il assiste à une démonstration d’hypnose du docteur Parent. Celui-ci endort la cousine et lui ordonne d’accomplir une tâche précise qu’elle réalise le lendemain, sans en garder le moindre souvenir. Cet événement bouleverse profondément le narrateur. Malgré les moqueries de ses amis, il est convaincu de la puissance invisible qui l’oppresse.
La spirale de la terreur
Quelques jours après son retour, des événements étranges se multiplient : des objets se brisent durant la nuit, et une rose est cueillie par une force invisible sous ses yeux. Terrifié et persuadé que sa maison est hantée, il décide de partir, mais se sent comme paralysé, incapable de se libérer de cette emprise. Il baptise cette entité le Horla, croyant que lui donner un nom pourrait le rendre moins redoutable.
Dans une tentative désespérée, il se rend à la bibliothèque de Rouen pour consulter des ouvrages sur les phénomènes occultes. Bien qu’il ne trouve rien qui corresponde exactement à son cas, une revue scientifique mentionne une épidémie de folie au Brésil, semblable à ses symptômes. Se rappelant le passage du trois-mâts brésilien au début de ses troubles, il établit un lien. Ayant réussi à entrevoir l’entité dans un miroir, il décide d’y mettre fin en détruisant la maison.
Le dénouement tragique
Depuis une chambre d’hôtel à Rouen, il relate l’incendie qu’il a provoqué. Bien que ses domestiques aient péri dans les flammes, il est persuadé que le Horla a survécu. Désormais convaincu que la seule issue possible est de se donner la mort, il envisage cette solution comme son ultime délivrance.
Le Horla : une nouvelle entre réalité et surnaturel
Contexte et influence
Publié en deux versions (1886 et 1887), Le Horla est considéré comme une œuvre pionnière dans l’exploration des troubles psychiatriques à travers le prisme du fantastique. Ce récit, présenté sous la forme d’un journal intime, suit la dégradation mentale d’un homme confronté à une entité invisible. Maupassant innove en adoptant un point de vue interne, laissant le lecteur seul juge de la santé mentale du narrateur. Ce procédé influencera des auteurs comme H. P. Lovecraft, notamment par l’utilisation des « écrits retrouvés », un genre où la subjectivité du narrateur brouille la frontière entre réalité et folie.
Les thèmes et le surnaturel dans Le Horla de Maupassant
Le récit traite de la folie sous deux angles : est-elle d’origine psychologique ou le fruit d’une rencontre avec l’inexplicable ? La tension entre le réel et l’irrationnel est omniprésente, inscrivant Le Horla dans la tradition littéraire fantastique initiée au XIXe siècle par des œuvres comme La Peau de chagrin de Balzac ou Le Portrait de Dorian Gray de Wilde.
L’importance du contexte scientifique
À l’époque, la psychologie émergeait comme discipline scientifique indépendante, se détachant progressivement de la philosophie. L’intérêt croissant pour les phénomènes mentaux et les troubles de la perception nourrit le caractère novateur du récit, où la perte de repères devient une véritable descente aux enfers.
👉🏻 Pour aller plus loin. Pour compléter cet article, nous t’invitons à écouter ce podcast de Radio France : « Le Horla » d’après Guy de Maupassant. Tu peux aussi lire cette courte nouvelle en empruntant cet ouvrage dans le CDI de ton lycée ou en bibliothèque, ou bien directement sur internet en consultant par exemple cette version en PDF.