polyptote figure de style

Le polyptote, une figure de style qui joue avec la grammaire et les mots

Au sommaire de cet article 👀

Qu’est-ce qu’un polyptote ? C’est une figure de style dont on n’entend pas trop parler en cours de français. Pourtant, elle est relativement facile à comprendre et à repérer. On voit avec toi tout ce que tu dois savoir à propos du polyptote ! 😁

Une définition du polyptote

Étymologie et définition du polyptote

Petit point historique sur l’origine du mot polyptote (polyptoton en anglais) : on le doit du grec ancien polúptôto, πολύπτωτος, qui signifie « à plusieurs cas » 🇬🇷 (opposé de monoptote). C’est une figure de style très utilisée au théâtre comme en poésie, voire aussi dans des romans de littérature classique.

Selon Pierre Fontanier, un polyptote (pas une !) est une figure de style qui consiste à « employer dans la même phrase ou période plusieurs formes […] d’un même mot, c’est-à-dire plusieurs de ces formes que l’on distingue en grammaire […] ». 🤓

Pour illustrer sa définition, il cite un extrait de l’Ecclésiaste : « Vanité des vanités, tout n’est que vanité ! ». Tu remarqueras que le mot vanité est utilisé de différentes manières tout au long de la phrase. C’est là le principe d’un polyptote : jouer avec des variations de mots !

Des exemples du polyptote

Voici des exemples qui montrent une anaphore avec des variations grammaticales :

👉 « Madame se meurt ! Madame est morte ! », Jacques-Bénigne Bossuet, Oraison funèbre de Henriette-Anne d’Angleterre.

👉 « Murs, ville, / Et port, / Asile / De mort, / Mer grise / Où brise / La brise, / Tout dort. », Victor Hugo, Les Djinns.

👉 « Ce n’étaient qu’amours, amants, amantes (…) », Gustave Flaubert, Madame Bovary.

Comment repérer un polyptote ?

Un polyptote se repère car il répète une forme différente d’un mot. C’est une figure dérivative, donc il faut que tu fasses attention aux variations morphologiques.

Pour mieux en repérer, il te suffit de trouver le mot qui est référencé dans l’extrait et voir la variation dans le texte. 

Voici un exemple qui te montre ces variations :

👉 J’écris pour le plaisir de l’écriture. En écrivant, j’inscris mon encre sur un papier blanc. Cet écrit survivra, car toute écriture est faite pour être lue. Je vis pour écrire et j’écris pour vivre.

Ici, tu vois que l’exemple joue sur l’écriture et ses formes. Elle est tantôt un mot (écrit, écriture), tantôt un verbe (écris, écrivant, écrire). C’est ça un polyptote !

Quelle est la différence entre un polyptote et une anaphore ?

Définition d’une anaphore

Une anaphore est une figure de style qui consiste en la répétition d’un mot ou d’un groupe de mots au début d’une phrase ou d’un vers. C’est une figure de rhétorique qui est très utilisée dans les discours politiques et qui crée un effet d’importance au texte.

La différence entre une anaphore et un polyptote

Voici deux exemples de ces deux figures du discours :

Exemple d’anaphore 👉 « Rome, l’unique objet de mon ressentiment ! / Rome, à qui vient ton bras d’immoler mon amant ! / Rome qui t’a vu naître, et que ton cœur adore ! / Rome enfin que je hais parce qu’elle t’honore ! », Corneille, Horace.

Exemple de polyptote 👉 « Je viens de traverser la ville et tout le monde courait… Je ne peux pas vous dire laquelle… je l’ai traversé en courant… mais quand j’ai vu que tout le monde courait… je me suis mis à courir comme tout le monde sans raison… À un moment, je courais coude à coude avec un monsieur, je lui dis « Dites-moi…pourquoi tous ces gens courent-ils comme des fous… », Raymond Devos.

Avec l’anaphore de Corneille, c’est la ville de Rome qui est répétée dans ses vers. Il ne varie pas la façon dont il le dit, l’anaphore reste intact.

Quant au polyptote de Raymond Devos, on constate que ce dernier propose des variations du verbe courir : courait, courant, courir, courent. Tu remarques donc ici que le polyptote ne laissera pas forcément le mot intact, il va chercher à varier la catégorie grammaticale ou la forme du mot.

Comment faire la différence entre un polyptote et une homéotéleute ?

Définition d’une homéotéleute

Une homéotéleute est une figure de style qui consiste à répéter une ou plusieurs syllabes finales qui sont homophones. Ainsi, cette figure de style ressemble à une allitération ou à une assonance. La différence est que l’homéotéleute se concentre seulement sur la partie finale du mot, pas une variation.

La différence entre une homéotéleute et un polyptote

Voyons avec ces deux exemples la différence entre les deux procédés stylistiques :

Exemple de homéotéleute 👉 « MONSIEUR PURGON : Et je veux qu’avant qu’il soit quatre jours, vous deveniez dans un état incurable. / ARGAN : Ah ! Miséricorde ! / MONSIEUR PURGON : Que vous tombiez dans la bradypepsie. / ARGAN : Monsieur Purgon ! / MONSIEUR PURGON : De la bradypepsie, dans la dyspepsie. / ARGAN : Monsieur Purgon ! / MONSIEUR PURGON : De la dyspepsie, dans l’apepsie. / ARGAN : Monsieur Purgon ! / MONSIEUR PURGON : De l’apepsie, dans la lienterie. / ARGAN : Monsieur Purgon ! / MONSIEUR PURGON : De la lienterie, dans la dysentrie. / ARGAN : Monsieur Purgon ! / MONSIEUR PURGON : De la dysentrie, dans l’hydropisie. / ARGAN : Monsieur Purgon ! / MONSIEUR PURGON : Et de l’hydropisie dans la privation de la vie, où vous aura conduit votre folie. », Molière, Le malade imaginaire.

Exemple de polyptote 👉 « Temps passés Trépassés Les dieux qui me formâtes / Je ne vis qu’en passant ainsi que vous passâtes / Et détournant mes yeux de ce vide avenir / En moi-même je vois tout le passé grandir », Guillaume Apollinaire, Cortège, Alcools.

Avec l’extrait de Molière, l’homéotéleute se trouve dans la répétition de la syllabe finale /i/ avec les mots suivants : bradypepsie, dyspepsie, apepsie, lienterie, dysentrie, hydropisie, folie. Tous les mots riment et conservent la même sonorité tout au long de l’échange théâtral.

Quant à l’exemple d’Apollinaire, on remarque que c’est le mot « passé » qui est répété sous différentes formes : passé (x2), trépassés, passant, passâtes. Dans le poème, Apollinaire fait un jeu avec les sons et la variation des mots consiste en la répétition de ce même mot, celui du passé.

Quelle est la différence entre un polyptote et une métonymie ?

Définition d’une métonymie

Une métonymie est un procédé linguistique qui consiste à employer un mot pour faire référence à un autre. Il peut se caractériser de différentes façons :

  • Le contenant pour le contenu, la partie pour un tout
  • La cause pour l’effet
  • L’effet pour la cause
  • La matière pour l’objet
  • Le lieu pour l’objet ou les habitants
  • L’auteur pour son œuvre
  • L’instrument pour l’agent

La différence entre une métonymie et un polyptote

Penchons nous sur deux exemples qui nous permettront de bien distinguer les deux figures de style :

Exemple de métonymie 👉 « Rome à ne vous plus voir m’a-t-elle condamnée ? », Jean Racine, Britannicus.

Exemple de polyptote 👉 « Tel est pris qui croyait prendre. », Jean de la Fontaine, Le rat et l’huître.

Dans l’extrait de Britannicus, la ville de Rome est utilisée comme symbole pour désigner l’État et le pouvoir mis en place. Il n’y a donc pas de répétition du même mot dans la phrase.

La Fable de la Fontaine présente un polyptote très connu qui est même devenu une maxime (expression). Ici, c’est le verbe prendre qui est présent dans le vers sous deux formes : au passé composé et à l’infinitif. Ainsi, le poète souligne l’effet de boucle et d’ironie présents dans la situation comique entre le rat et l’huître.

Comment faire la différence entre un polyptote et une synecdoque ?

Définition d’une synecdoque

La synecdoque est un procédé littéraire qui consiste à prendre le plus pour le moins, la partie pour le tout ou le tout pour le moins. Elle fonctionne similairement à une métonymie, bien que les deux se distinguent.

La différence entre un polyptote et une synecdoque

Intéressons nous à ces deux exemples afin de mieux distinguer ces deux figures de style :

Exemple de polyptote 👉 « Je montai dans un autobus plein de contribuables qui donnaient des sous à un contribuable qui avait sur son ventre de contribuable une petite boîte qui contribuait à permettre aux autres contribuables de continuer leur trajet de contribuables. », Raymond Queneau, Exercices de style.

Exemple de synecdoque 👉 « Enfermé dans mon sépulcre blanc, j’ignore où vous en êtes, si vous allez trouver votre amie à la campagne, si la personne que vous me disiez devoir être nommée et déclarée, si les avocats se sont remis à plaider, si le Châtelet continue à faire ses fonctions, si l’Opéra-Comique attire toujours tout Paris. », Voltaire, Lettre à Madame la marquise du Deffand.

Comme tu as dû le comprendre, la synecdoque dépend de l’utilisation de Paris pour mieux présenter l’image de la Cour et de la noblesse. Paris représente le haut de la société aux yeux de Voltaire quand il l’utilise dans cette lettre.

En ce qui concerne le polyptote, Raymond Queneau propose un jeu de mots et de variations avec le terme « contribu- » : contribuable, contribuables, contribuait. Cette répétition incessante permet d’accentuer le cycle perpétuel du quotidien.

Quelle est la différence entre un polyptote et une syllepse ?

Définition d’une syllepse

La syllepse est une procédé stylistique qui permet d’utiliser un mot pour son sens propre et pour son sens figuré. Un petit exemple pour illustrer une syllepse est le suivant : « J’ai appelé la police, mais ils ne sont pas encore arrivés ». Ici, la police est utilisée au sens propre pour désigner les policiers (ils) et au sens figuré pour montrer l’entité (police).

La différence entre un polyptote et une syllepse

Maintenant, voyons la différence entre les deux figures de rhétorique :

Exemple de polyptote 👉 « Raisonner est l’emploi de toute ma maison, / Et le raisonnement en bannit la raison… ! », Molière, Les Femmes savantes.

Exemple de syllepse 👉 « Vous avez déjà vu un petit poussin ? C’est mignon à croquer ! C’est une petite boule jaune… Ça fait : cui-cui…Il n’était pas cuit ! / Et je n’en ai fait qu’une bouchée / dans mon gros ventre ! », Raymond Devos, Le petit poussin.

Avec Raymond Devos, l’image du poussin est vite métamorphosée en une autre forme : celle d’une « petite boule jaune ». La syllepse fonctionne puisqu’elle propose une variation des mots sans en toucher l’idée. Il ne s’agit pas de garder la même racine, plutôt de garder l’idée du poussin et en changer la forme.

Dans l’extrait de Molière, c’est le polyptote avec le mot « raison » qui est remarqué : raison (x2) et raisonnement. Ici, Molière veut présenter cette idée de boucle comme l’a fait Raymond Queneau pour mieux la briser. ll crée une opposition thématique malgré le rapprochement lexical.

Quels sont les effets produits par un polyptote ?

En utilisant un polyptote, l’auteur joue sur le plan lexical, car il se permet des reprises et des variations avec les mots. Il permet également de transformer le sens de la phrase. En effet, la répétition lui permet d’élargir les attentes en termes de sens. Comme nous avons pu le voir avec l’exemple de Molière dans l’École des femmes, le terme de raison est utilisé pour montrer l’ironie et le sarcasme.

Son emploi est aussi lyrique, musical et sonore. La variation constante des mots avec leur même racine crée une musicalité dans le texte et le rend plus attrayant aux lecteurs. Les figures de style sont utilisées pour apporter de la beauté au texte et le rendre plus agréable à la lecture.

Maintenant, tu sais tout sur le polyptote ! 👏

Exercice sur le polyptote

Cet exercice consiste à vérifier si tu as bien compris ce qu’est un polyptote. On te demande de choisir le mot de ton choix et de varier sa forme selon ton envie. 

Ne triche pas 🤗 !

Solution :

Je me trompe sur tout, c’est de la tromperie. Pourtant, on apprend en se trompant, non ? Pas quand on est un trompeur, un menteur, un joueur. Là, tu peux me croire, car, cette fois-ci, je ne me trompe pas.

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